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LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Le résultat des élections a donné satisfaction au monde des affaires. Tel est le fait brutal qui ressort de la comparaison des cours au 14 et au 28 septembre. On sait que les élections ont eu lieu le 22. Le samedi 14, au moment de la réponse des primes sur les valeurs, la Bourse paraissait décidée à escompter dans un sens favorable l’événement attendu. Or la rente 3 pour 100 était, à ce moment-là, à 86.47, coupon trimestriel inclus, l’amortissable à 90 francs, le 4 1/2 à 104.65. La hausse allait-elle se produire avant même que les élections eussent lieu ? C’était pousser un peu loin la confiance. Déjà la hausse de la rente atteignait 1 fr. 17 depuis le dernier cours de compensation, celle de l’amortissable était de 0 fr. 80, celle du 4 1/2 de 0 fr. 60.

La dernière semaine avant le grand combat électoral s’est passée dans une attente ferme, mais prudente. Le coupon détaché le 16 sur la rente n’a pas été regagné ; le samedi 21, la rente se tenait à 85.60, ex-coupon, après 85.30 ou 85.35 au plus bas.

Un bon résultat des élections, pour la Bourse, c’est un résultat qui maintient le statu quo au lieu de préparer une révolution et qui rend vraisemblable l’avènement des modérés. En un mot, c’est le triomphe de la paix et de la stabilité. Le monde financier ne demande pas autre chose.

Les banquiers, les grands spéculateurs attendaient depuis longtemps le moment de faire des affaires, de lancer des opérations dont quelques-unes ont passé par plusieurs années de préparation. On veut ouvrir une campagne de créations de société et ne plus se borner à émettre des emprunts d’états, ce qui semblait être, tous ces derniers temps, l’unique souci des grands manieurs d’argent.

Les fonds d’états sont à des prix très élevés, quelques-uns presque exagérés. De plus, la dernière grande expérience faite dans ce sens, l’émission de valeurs sur valeurs de la république argentine, a mal tourné. Elle vient d’aboutir à une sorte de krach. Les gouvernemens argentins, soit de l’état fédéral, soit des provinces, se sont abandonnés aux plus agréables, mais aussi aux plus dangereuses illusions sur la manière de développer la prospérité et la richesse dans leur immense pays. Ils ont lancé emprunts sur emprunts et aussi multiplié follement les émissions de papier-monnaie. La prime sur l’or s’est élevée de 50 à 90 assez lentement, puis brusquement de 90 à 117, et enfin à 105