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venez à moi ; écoutez, et vous trouverez la vie » (55-1)[1]. C’est ce touchant appel qui a inspiré celui de l’évangile : « venez à moi, vous tous qui êtes surchargés et accablés, et je vous soulagerai » (Matth., 11-26).

« Cherchez Jéhova, pendant que vous pouvez le trouver ; invoquez-le, pendant qu’il est proche » (55-6). Et dans Mathieu : « Cherchez et vous trouverez » (7-7).

« Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont au-dessus de vos voies et mes pensées de vos pensées » (55-9). Paul dit à son tour : « O profondeur de la sagesse de Dieu ! Combien ses conseils sont incompréhensibles et combien ses voies inexplicables ! » (Rom., 11-33.) Et cela est devenu un des lieux-communs de la prédication chrétienne.

En vérité, ne faut-il pas bien de la complaisance pour admettre que de pareilles idées ont été exprimées dans de pareils termes, soit au temps de Sennachérib, soit à l’époque de Cyrus ?


V

On a vu que tout ce qu’on lit sous le nom d’Isaïe, depuis le chapitre XI, jusqu’au chapitre LXVI inclusivement, est une addition au texte du Premier Isaïe, addition qui forme une composition à part, la mieux suivie certainement qu’il y ait dans aucun livre prophétique. Cela fait présumer qu’il peut se trouver ailleurs d’autres additions-moins considérables, et je crois qu’il s’en1 trouve en effet : les unes suggérées par des événemens postérieurs à la date de l’œuvre principale où on les a placées, les autres qui peuvent être d’une date quelconque, mais qui, étant éparses et ne s’étant pas produites

  1. Par quelle erreur, âmes vaines,
    Du plus pur sang de vos veines
    Achetez-vous si souvent,
    Non un pain qui vous repaisse,
    Mais une ombre qui vous laisse
    Plus affamés que devant !
    Le pain que je vous propose…
    C’est ce pain si délectable
    Que ne sert point à sa table
    Le monde que vous suivez.
    Je l’offre à qui veut me suivre :
    Approchez. Voulez-vous vivre ?
    Prenez, mangez et vivez.
    (RACINE, Cantiques, 4.)