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aussi ne se souciait pas qu’il eût l’honneur de rebâtir le Temple ; elle se montra d’abord opposée à ce projet, et il eut de la peine à la ramener. Jéhova continue et déclare que c’est parce qu’ils ne rebâtissaient pas sa maison, qu’il a déchaîné contre eux la famine (1-10 et 2-16) ; cette famine, qui désola la Terre-sainte et la Syrie, sévit en effet peu avant qu’Hérode eût commencé à rebâtir le Temple (Josèphe, 15-9-1).

A côté de Zorobabel, Aggée nomme le grand-prêtre Jésus ou Josué. Au temps des Asmonées, le grand-prêtre était le même que le prince ; mais il n’en était plus ainsi sous Hérode ; car en se substituant à eux comme roi, il n’osa se faire grand-prêtre, étant profane comme Iduméen. Il y eut donc alors un roi et un grand prêtre en face l’un de l’autre, comme cela est mieux marqué encore dans Zacharie. — Du reste, ce Josué ou Jésus figure avec Zorobabel dans le livre d’Esdras ; mais il n’y est pas dit qu’il fût grand-prêtre.

Mais voici comment Jéhova lui-même parle du Temple dans Aggée : « Qui est-ce qui reste parmi vous, qui a vu cette maison dans sa gloire première ? Et quand vous la voyez maintenant, n’est-il pas vrai qu’elle est comme rien à vos yeux ? .. Mais je mettrai en mouvement toutes les nations, et ici viendront les trésors de tous les peuples, et je remplirai cette maison de splendeur. L’or est à moi, l’argent est à moi, et grande sera la splendeur de cette maison, plus encore que celle de la première, et en ce lieu je mettrai la paix (2, 3-9). » De telles paroles ne peuvent convenir qu’au Temple d’Hérode. Au temps de Zorobabel, sous le second Darius, il ne restait personne qui eût pu voir l’ancien Temple. Mais au temps d’Hérode, beaucoup avaient vu le Temple, tel qu’il était avant la prise de la ville par Hérode et Sossius, c’est-à-dire seize ans auparavant, et le comparer à ce qu’il était depuis ces seize ans. Et surtout les magnifiques promesses qu’on vient de lire ne peuvent se rapporter qu’à ce règne à la fois brillant et paisible, et à une époque où le Temple en effet recevait des offrandes apportées de tous les points du monde, et même du Palatin.

Enfin voici ce qu’on lit aux derniers versets (2-21-23) : « Voici que j’ébranle le ciel et la terre ; je renverse le trône des rois, et je brise la puissance des royaumes des Nations ; je culbute les chars et ceux qui les montent, et les chevaux tomberont et les cavaliers avec eux, chacun par l’épée de son frère. Et en ce temps-là, je te prends, Zorobabel, fils de Salathiel, mon serviteur, et je t’établis pour être mon anneau[1], car je t’ai choisi, dit Jéhova Sabaoth. » Ces paroles sont d’une parfaite clarté. En ce temps-là en effet tombent

  1. C’est-à-dire mon sceau, l’instrument et la manifestation de ma puissance.