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les littérateurs et les artistes, les fonctions de secrétaire de la classe avaient été exercées par des hommes choisis dans son sein ; mais ces fonctions, toutes temporaires d’ailleurs[1], étaient restées le lot de quelques membres appartenant aux sections de Grammaire, de Poésie ou de Langues anciennes ; aucun artiste de profession, ni même aucun érudit familiarisé avec les études relatives à l’art ou à son histoire n’avait été appelé à les remplir. Or l’arrêté du premier consul, modifiant le régime auquel l’Institut avait été soumis jusqu’alors, portait que dans chaque classe il y aurait « un secrétaire perpétuel » au lieu des secrétaires qui s’y succédaient annuellement, et comme, aux termes de cet arrêté, l’ancienne classe de la Littérature et des Beaux-Arts devenait celle des Beaux-Arts exclusivement, il était tout naturel que les membres qui la composaient choisissent pour les représenter un d’entre eux, ou, tout au moins, un érudit qui parlât leur langue et que sa propre expérience eût initié à leurs secrets. Celui qu’ils honorèrent de leurs suffrages, Joachim Lebreton, s’en était rendu digne par la part active qu’il venait de prendre à la formation et aux enrichissemens du Muséum, par le zèle et par l’intelligence dont il avait fait preuve, au ministère de l’intérieur comme chef du bureau des beaux-arts, au tribunat comme rapporteur d’un projet de loi relatif aux monnaies, enfin, et surtout par une indépendance de caractère qui, tout en lui méritant l’estime de ses confrères, devait, treize ans plus tard, attirer sur lui les rigueurs du pouvoir.

Avant d’être nommé secrétaire perpétuel de la quatrième classe, Lebreton d’ailleurs avait, dans une autre classe de l’Institut, rempli à plusieurs reprises, et toujours très utilement, les fonctions de secrétaire temporaire et de rapporteur. Membre, dès la fondation, de la classe des Sciences morales et politiques, il s’y était signalé par des services rendus avec un complet dévoûment et avec une parfaite justesse d’esprit.

Ce qu’il avait été, depuis 1795, dans la classe des Sciences morales et politiques, Lebreton le fut encore dans la classe des Beaux-Arts. Dès les premières années qui suivirent son entrée en fonctions, il avait largement donné la mesure de son zèle et de ses aptitudes spéciales. Grâce à lui, les travaux en commun de ses

  1. Aux termes des règlemens en vigueur de 1795 à 1803, le secrétaire était nommé pour une année seulement. Toutefois, il pouvait être réélu, pourvu qu’une année au moins se fût écoulée depuis le jour où il avait quitté ses fonctions. C’est ainsi que dans la classe de la littérature et des beaux-arts, Monges, de Fontanes et Villars furent élus chacun plusieurs fois ; les autres secrétaires de la classe, jusqu’à 1802 inclusivement, furent Andrieux, Collin d’Harleville, François de Neufchâteau, de La Porte du Theil et Sicard.