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Rois, où ce personnage se trouve précisément rapproché d’Isaïe (u, 19-2). Et le nom d’Éliacim a amené celui de Sobna. Sobna, d’ailleurs, signifiant jeune, à ce qu’il semble, on a pu désigner ainsi le plus jeune des trois frères qui s’étaient succédé dans les fonctions de grand-prêtre (Josèphe, 12-5).

On voit que l’interprétation que je donne du chapitre XXII en rattache naturellement les deux parties l’une à l’autre. Et cette manière de raconter, sous des noms empruntés au livre des Rois, l’histoire de Ménélas et d’Alcime est un des plus curieux exemples de ce que j’ai appelé les transpositions des prophètes.

Le sujet du chapitre XXIII est la prophétie de la ruine de Tyr. Elle offre des difficultés, et pour essayer de les résoudre, il est nécessaire de se reporter à une autre prophétie sur le même sujet qui se trouve dans Ézéchiel. J’attendrai donc, pour la discuter, que je sois arrivé à ce prophète.

Ici se présente un morceau étendu, qui remplit à lui seul quatre chapitres (XXIV-XXVII), et qui est, avec la fin du chapitre XIX, ce qui, dans le Premier Isaïe, donne l’impression la moins contestable d’un événement du IIe siècle. Les critiques attachés à la tradition n’ont pu s’y reconnaître, ni en se plaçant au VIIIe siècle, ni en descendant au via. Cette place forte, cette cité aux remparts si hauts et si menaçans, ce n’est ni Babylone, ni aucune ville étrangère. C’est l’acra, où les étrangers étaient campés au-dessus même de Jérusalem, qui fut enfin emportée sous le grand prêtre Simon, puis entièrement rasée par le travail d’un peuple entier, et assura ainsi son indépendance.

« Jéhova, tu as changé leur enceinte en décombres, leur citadelle en une ruine. La ville des étrangers n’est plus ; elle ne sera jamais rebâtie. Maintenant la nation redoutable te révérera ; la ville aux populations menaçantes te craindra (25-2-3). »

« Jéhova Sabaoth prépare à tous les peuples un festin sur sa montagne[1]. Voyez, disent-ils : c’est Jéhova, de qui nous avions attendu qu’il nous sauverait ; c’est Jéhova en qui nous avions espéré. Soyons dans l’allégresse, réjouissons-nous de son secours ; car la main de Jéhova repose sur cette montagne (9-10). »

« La haute citadelle, avec ses murailles, on l’abat, on la renverse, on la jette à terre dans la poussière. En ce jour, on chante un cantique dans la terre de Juda : nous aussi nous avons une place forte ; c’est celui qui nous donne son secours en guise de mur et de fossé. Ouvrez les portes, pour faire entrer ici un peuple saint et fidèle (25-12, 26-1-2). »

« Il a abaissé ceux qui résidaient si haut. La ville élevée, il l’a

  1. Celle de Sion, où s’élève le Temple.