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ou plutôt la loyauté syrienne est si faible, que les Syriens renoncent à l’impôt de la couronne, qu’on leur payait jusqu’alors, et qui était le dernier vestige de leur souveraineté. Et ceux de Juda ne datèrent plus les actes publics que par le nom de Simon, prêtre et ethnarque. On n’a son titre qu’en grec (I Macc., XV, 1). Cela eut lieu l’an 142 ayant notre ère, vingt-cinq ans après la révolte de Mathathias.

Dès l’année suivante, Simon à son tour assiégea l’acra et la réduisit. Il ne se contenta pas d’en raser les murailles ; il voulut détruire et raser la hauteur même sur laquelle les Syriens avaient bâti leur place forte. Josèphe dit que le peuple s’y employa avec acharnement pendant trois années, le travail ne s’interrompant ni jour ni nuit, jusqu’à ce qu’enfin la hauteur fût absolument nivelée. Et une fête annuelle fut établie en commémoration de la ruine de l’acra.

Simon à son tour osa sortir de ses limites ; il prit plusieurs villes de la côte, entre, autres Joppé, la moderne Jaffa, dont il fit le port du pays. Le Premier livre des Maccabées célèbre son règne comme un âge d’or (chap. XIV). Ce règne fut court. Simon mourut assassiné l’an 135, et l’assassin, qui était son gendre, tua avec lui deux de ses fils. Le troisième échappa et succéda à son père. Il s’appelait Jean, de son nom hébreu, et prit plus tard le nom grec d’Hyrcan[1]. Il fut grand-prêtre ou prince pendant tout près de trente ans, et son règne fut glorieux. Il prit Sichem et détruisit le temple samaritain du mont Garizim, élevé au temps d’Alexandre. Il prit aussi et ruina Samarie, l’antique rivale de Jérusalem. Enfin il soumit l’Idumée et força les Iduméens à se faire circoncire. Les fils d’Ésaü furent désormais les sujets des fils de Jacob et confondus parmi eux.

Voilà les événemens qui remplirent la seconde moitié du IIe siècle (Hyrcan est mort l’an 107), et voilà aussi, selon moi, les événemens qui ont inspiré les livres mis sous le nom des prophètes, et dont l’impression s’y fait sentir constamment. Mais il est temps de les aborder.

Le recueil s’ouvre par celui qui porte le nom d’Isaïe. Mais la critique, depuis qu’il y a une critique en ces matières, a aisément reconnu que la dernière moitié du livre (chap. XL-LXVI) compose véritablement un livre à part, qui ne fait pas suite à ce qui précède, et qui est d’une autre main et d’une autre date. On

  1. Quand il eut fait la guerre en Hyrcanie contre les Parthes comme allié du roi de Syrie, Antiochus de Sidé ou Sidétès.