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résistèrent plus longtemps : la moitié de leur tribu occupait encore la Géorgie en 1835. On avait pourtant, versé entre leurs mains des sommes considérables, comme prix de leur abandon. Le gouvernement leur donnait environ 1 million de dollars par million d’acres. Ainsi, les Crecks reçurent 22 millions de dollars pour 25 millions d’acres, et les Choctaws, 23 millions de dollars pour 20 millions d’acres.

En 1836, la loi édictée sous la présidence de Monroë était presque exécutée. Le recensement de cette époque montre que 51,000 Peaux-Rouges avaient traversé le Mississipi, et que très peu de temps après, 40,000 autres se proposaient de suivre le mouvement. Il n’en resterait plus alors que 12,000 à l’orient du Père des fleuves.

En somme, outre les nouvelles terres mises à la disposition de ces tribus, l’exode coûta au gouvernement 303 millions de francs.

C’est ainsi que l’on constitua l’Indian Territory, compris entre le Kansas, le Missouri, le Texas, l’Arkansas et le Nouveau-Mexique. Restaient les tribus nomades du Far-West, sur lesquelles l’Union n’avait aucun recours et qui, depuis la guerre de sécession, étaient devenues un danger permanent.

L’attaque des trains, le pillage des fermes, le massacre des settlers, voilà les occupations habituelles des hôtes de ces parages. Les chevelures des victimes, conservées à titre de trophées de guerre, indiquaient le nombre de leurs forfaits, qu’ils appelaient des victoires. On sentit le besoin de grouper ces dans redoutables, afin de rendre leur surveillance plus facile.

En 1869, le congrès chargea une commission d’étudier cette grave question. Le problème se posait comme il suit : trouver dans le Far-West, loin du chemin de fer, des territoires propres à recevoir ces tribus errantes. Nous disons des territoires, parce que l’on se proposait de disséminer les clans, de les isoler les uns des autres, pour les empêcher de concerter une action commune, après entente préalable. On n’avait pas perdu le souvenir des exploits de Tecumseh pendant la guerre de 1812, la concentration des Peaux-Rouges opérée par son ordre et les utiles secours que ces auxiliaires prêtèrent aux Anglais. On n’avait pas oublié non plus le chef canadien Pontiac (1759), ennemi juré des Anglais, disant aux guerriers de tous les clans voisins : « Unissons-nous pour jeter à la mer ces chiens déguisés en habits toujours teints de sang ! »

Le gouvernement fédéral devait pourvoir aux frais d’installation, et tenter de civiliser ces barbares en leur donnant des instrumens aratoires, essayer, en un mot, de fixer au sol ces dangereux nomades. On leur envoya des missionnaires, des agriculteurs, des