Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 93.djvu/187

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’elle ne leur est pas spéciale, mais existe chez les végétaux aussi, et constitue de la sorte une fonction inhérente à toute matière vivante.

Les plantes respirent, donc elles produisent de la chaleur; c’est là un fait bien avéré. La respiration des plantes a été mise en lumière par de nombreuses expériences, bien que la fonction chlorophyllienne qui détermine une décomposition d’acide carbonique en oxygène qui est exhalé, et en carbone qui se fixe dans les tissus, ait, pendant un temps fort long, masqué la respiration véritable, et fait considérer les végétaux comme respirant d’une façon différente de celle des animaux. En réalité, la respiration est la même pour ces deux catégories d’organismes : pour s’en assurer, il faut toutefois éliminer la fonction chlorophyllienne en ayant recours à un dispositif particulier, en opérant sur des plantes sans chlorophylle, ou sur des plantes chlorophyllées maintenues à l’obscurité, la fonction chlorophyllienne ne s’exerçant qu’à la lumière. En prenant les précautions voulues, on constate que la respiration existe chez toutes les plantes, plus vive, plus énergique, il est vrai, dans les plantes jeunes que dans les autres, dans les plantes en voie de développement que dans celles qui ont atteint leur pleine croissance. Cette respiration, comme celle des animaux, consiste en un phénomène chimique; il y a absorption d’oxygène et combinaison de celui-ci avec les tissus de la plante; il doit donc se développer de la chaleur. C’est bien en effet ce que nous démontre l’observation : tout ce qui vit dégage de la chaleur, en raison des phénomènes chimiques qui accompagnent la vie. La germination des graines, par exemple, ne se produit pas sans un dégagement de chaleur. Il suffit, pour s’en assurer, de placer un thermomètre dans le milieu d’un tas de graines en voie de germination, en ayant soin d’assurer l’élimination de l’acide carbonique à mesure qu’il se produit, — car il arrêterait la respiration et la calorification, — Et l’on voit le thermomètre, pour une température ambiante moyenne, s’élever à 5, 10, 15 ou 20 degrés au-dessus de celle-ci. Le dégagement de chaleur est donc considérable. Ces expériences, faites sur des graines très variées, ont toujours fourni le même résultat. Les fleurs dégagent aussi une quantité notable de chaleur, ainsi que Lamarck l’aie premier constaté. C’est avec les fleurs de certaines aroïdées que l’expérience réussit le mieux et fournit les données les plus nettes. La température propre de la spathe de ces plantes, à l’époque de la pleine floraison, mesurée au thermomètre, indique une production de chaleur considérable, et celle-ci peut présenter un excès de 5, 10 ou 15 degrés sur la température de l’air ambiant. Et, ce qui prouve bien que cette calorification est un résultat de la respiration, si l’on enduit la fleur d’huile,