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« Le roi Piyadasi envoie à l’assemblée du clergé du Magadha (c’est la région où est située sa capitale, Pâtalipoutra, au confluent de la Jumna et du Gange), avec son salut, ses souhaits de santé et de prospérité. Vous savez, seigneurs, quels sont, à l’égard du Bouddha, de la Loi et du Clergé, mon respect et ma foi? Tout ce qui a été dit par le bienheureux Bouddha, tout cela est bien dit, et aussi ce que j’ordonne moi-même; je souhaite, seigneurs, que cette loi soit de longue durée. Voici, par exemple, seigneurs, des enseignemens de la loi : « l’exposé de la discipline, » les « pouvoirs surnaturels, » les « terreurs de l’avenir, » les « stances du solitaire, » le « soutra de la perfection, » les « questions d’Oupatishya, » le « sermon à Râhula, « prononcé par le Bouddha bienheureux au sujet du mensonge. Ces enseignemens, seigneurs, je désire que beaucoup de bhikshous (religieux) et de bhikshounîs (religieuses) les entendent, les méditent, et aussi les laïques des deux sexes. C’est pourquoi, seigneurs, je fais graver ceci, afin que l’on connaisse mes intentions. »

Les protestations de respect pour le Bouddha, la loi et le clergé reproduisent la formule même de l’acte de foi bouddhique ; il consiste, dans la terminologie consacrée, à proclamer sa confiance aux « trois joyaux, » le Bouddha, le Dharma, c’est-à-dire la loi qu’il a enseignée, le Sangha, c’est-à-dire l’assemblée du clergé monastique qu’il a fondé.

Sous l’empire de sa croyance nouvelle, la première préoccupation d’Açoka est très caractéristique ; il songe d’abord à protéger la vie des animaux :

« Il ne faut, dit-il, immoler aucune vie dans des sacrifices ; il ne faut pas faire de festins. Car le roi Piyadasi aimé des dieux y voit un grand mal. Il est vrai que bien des festins ont été tolérés par le roi Piyadasi aimé des dieux. Autrefois, chaque jour, dans ses cuisines, des centaines de milliers de créatures étaient tuées pour sa table. Au moment où cet édit est gravé, on tue seulement trois animaux pour ma table, deux paons et une gazelle, et encore la gazelle pas régulièrement. Ces animaux mêmes ne seront plus tués à l’avenir. »

On ne saurait mettre dans ses exhortations plus de simplicité et de bonhomie. Plus tard, le roi s’efforce d’être plus précis, de réglementer davantage. Un édit de sa vingt-septième année énumère les espaces d’animaux dont la vie doit être invariablement sauvegardée, d’autres dont les femelles doivent être épargnées, soit quand elles sont pleines ou qu’elles ont des petits ; il indique les jours de fête religieuse auxquels il est interdit de tuer aucun animal, d’en mutiler, voire même d’en marquer au fer. Tout cela, du reste, sans