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déterminer les parallaxes de 10 à 15 étoiles par an. Il a commencé le travail par plusieurs étoiles des constellations de Cassiopée et du Cygne, dont les parallaxes paraissent être comprises entre 0",04 et 0", 19. Pour la Polaire, M. Pritchard a trouvé 0",07 ; cela veut dire que la Polaire est 3 millions de fois plus éloignée de nous que le soleil.

On admet généralement que les étoiles les plus brillantes sont aussi les plus voisines de nous ; cependant, parmi les parallaxes sensibles, connues jusqu’à présent, beaucoup appartiennent à des astres relativement faibles, et rien n’empêche de supposer que dans le nombre des étoiles qui n’ont pas été examinées et qui seront bientôt cataloguées par la photographie, il s’en trouve qui sont encore bien plus rapprochées de notre système solaire. En tout cas, elles ne tarderaient pas à être démasquées, puisque la simple inspection microscopique d’un même groupe, photographié à six mois d’intervalle, suffirait à révéler des déplacemens parallactiques tant soit peu sensibles.

Les mesures micrométriques directes des groupes stellaires ne nous révèlent que des déplacemens dans le sens perpendiculaire au rayon visuel ; le spectroscope seul peut nous faire connaître des mouvemens qui ont lieu dans la direction même du rayon. En effet, la couleur de la lumière qui nous vient d’une étoile est légèrement modifiée par la vitesse avec laquelle l’astre se rapproche ou s’éloigne de nous, et il s’ensuit que les raies spectrales sont un peu déviées vers la droite ou vers la gauche. (C’est pour la même raison que le sifflet d’une locomotive nous semble plus aigu quand le train arrive que lorsqu’il s’éloigne.) On a pu, par ce moyen, estimer la vitesse de translation d’un certain nombre d’étoiles brillantes dont les spectres ne sont pas trop difficiles à observer. Cependant l’œil se fatigue à comparer, aux raies immobiles d’un spectre artificiel, les lignes toujours tremblotantes des spectres stellaires, et les déviations ainsi constatées reposent le plus souvent sur des impressions fuyantes et fort incertaines. M. Vogel a réussi à s’affranchir de cette difficulté, causée par la scintillation, en photographiant les spectres stellaires en même temps que le spectre d’un gaz ; les planches qu’il a publiées font ressortir, avec une netteté surprenante, la déviation d’une raie commune à plusieurs spectres stellaires et qui correspond à la raie violette de l’hydrogène. On constate ainsi, par exemple, qu’une certaine étoile de la constellation d’Orion s’éloigne de l’observateur avec une vitesse de 86 kilomètres par seconde, vitesse qui se réduit à 61 kilomètres si elle est rapportée au soleil.

A Greenwich, où l’étude spectroscopique des vitesses de translation des étoiles se poursuit depuis quinze ans par le procédé