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si vite. En effet, les premiers essais de la photographie astronomique remontent à 1840, et, pendant près d’un demi-siècle, des tentatives fréquentes, malheureusement toujours isolées, ont montré que les difficultés du problème n’étaient point insolubles ; mais des préventions tenaces, un parti-pris dédaigneux, proscrivaient l’attirail des photographes des sanctuaires où se continuaient les traditions de Cassini et de Bradley. Ce n’est que dans ces dernières années que s’est enfui produit cet élan spontané, ce grand mouvement qui a trouvé son expression dans le « congrès astro-photographique » convoqué à Paris au mois d’avril 1887, et qui promet d’aboutir à une œuvre de la plus haute importance pour les âges futurs : l’exécution photographique d’une carte générale du ciel.


I

Cette application de la photographie est cependant si rationnelle, son rôle était si nettement indiqué et si bien prévu, qu’il semble qu’un pareil progrès eût. dû être obtenu tout de suite, à tout prix. Il y avait là un problème dont la solution était parfaitement circonscrite ; ce n’était vraiment plus qu’une question de temps et d’argent. L’histoire de la photographie, depuis ses origines, est, comme le développement logique d’une même pensée qui se réalise d’une manière continue et prend corps sous nos yeux. Les tâtonnemens par lesquels on découvre des substances de plus en plus sensibles ou les moyens de retenir, de fixer de plus en plus durablement les traces fugitives des phénomènes, tout cela pouvait être, à coup sûr, accéléré et mûri plus vite, en y mettant le prix. Et c’est ici qu’apparaît clairement le rôle toujours plus tyrannique de l’argent dans les entreprises scientifiques de notre époque.

La chimie et les arts mécaniques ont singulièrement multiplie les ressources des astronomes de cette lin de siècle. Est-il besoin de rappeler les progrès accomplis dans la fabrication et la taille des verres d’optique, dans l’agencement des grandes lunettes, les miroirs argentés, les chronographes électriques, le spectroscope et l’analyse spectrale, dont l’entrée en scène, si brillante et si inattendue, a probablement détourné, pendant quelque temps, l’attention des astronomes du développement des procédés photographiques ? Malheureusement, ces instrumens si puissans, ces nouveaux appareils qui ont étendu le domaine de l’observation, sont très coûteux. Pour obtenir de les mettre en œuvre, il a fallu, presque toujours, de grands efforts d’éloquence, le budget des sciences étant, comme on sait, celui dont la dotation est