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450,000, chacun d’eux, grand ou petit, ayant sa dotation propre et distincte, en biens-fonds, terres et maisons, en revenus sur des bénéfices, sur l’hôtel de ville, sur l’octroi, sur les messageries. — Et, dans chacun d’eux, les bourses ou demi-bourses étaient nombreuses, 600 dans le seul Louis-le-Grand. Au total, sur les 72,000 élèves du royaume, on en comptait 40,000 pour qui l’éducation secondaire était gratuite ou demi-gratuite ; aujourd’hui, sur 79,000, c’est moins de 5,000[1]. La raison en est qu’avant 1789, non-seulement les revenus étaient gros, mais les dépenses étaient petites. Un proviseur, un professeur, un répétitem--adjoint coûtait peu, 450, 600, 900, au plus 1,200 livres par an, juste ce qu’il faut à un célibataire pour subsister ; en effet, quantité de maîtres étaient prêtres ou moines, bénédictins, chanoines réguliers, oratoriens; ceux-ci, à eux seuls, desservaient trente collèges. Exempts des charges et des besoins qu’impose une famille, ils étaient sobres, par piété, ou du moins par discipline, habitude et respect humain ; quelquefois, le statut du collège les astreignait à la vie en commun[2], bien moins chère que la vie à part. — Même entente économique dans les autres rouages, dans l’arrangement et dans le jeu de toute la machine. Une famille, même rurale, n’était jamais loin d’un collège ; car il y avait des collèges dans presque toutes les petites villes, sept ou huit par département, quinze dans l’Ain, dix-sept dans l’Aisne[3]. L’enfant ou l’adolescent, de huit à dix-huit ans, n’entrait pas dans la solitude et la promiscuité d’une caserne civile ; il restait à portée de ses parens. S’ils étaient trop pauvres pour payer au collège les 300 francs de pension, ils mettaient leur fils dans une famille honnête, chez un artisan ou petit bourgeois de leur connaissance ; là,

  1. Albert Duruy, Ibid., p. 25.
  2. Lunet, Ibid., p. 110
  3. Statistiques des préfets. Ain, par Bossi, p. 368. — A Bourg, avant la révolution, 220 élèves, dont 70 pensionnaires, 8,000 livres de rente en biens-fonds confisqués pendant la révolution. — A Belley, les professeurs sont les congréganistes de Saint-Joseph : 250 élèves, 9,950 francs de revenu, en capitaux placés sur les pays d’États et anéantis par la révolution. — A Thoissy, 8,000 francs de rente en biens-fonds qui ont été vendus, etc. — Deux-Sèvres, par Dupin, an IX, et analyse par Perrière, p. 48 : « Avant la révolution, chaque ville du département, excepté Châtillon, avait son collège. — A Thouars, 60 pensionnaires à 300 livres par an et 40 externes. A Niort, 80 pensionnaires à 450 livres par an et 100 externes. » — Aisne, par Dauchy, p. 88. Avant 1789, presque tous les petits collèges étaient gratuits, et, dans les grands collèges, il y avait des bourses au concours. Sauf les grands bâtimens, tous leurs biens ont été aliénés et vendus, ainsi que les biens des 60 communautés qui donnaient aux filles l’instruction gratuite.— Eure, par Masson Saint-Amand. Avant 1789, 8 collèges, tous supprimés et éteints. — Drome, par Collin, p. 60 : « Avant la révolution, chaque ville avait son collège, etc. »