Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 92.djvu/262

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de charité, qui, en 1789, avaient 100,000 ou 110,000 occupans, ne peuvent plus en entretenir que le tiers ou la moitié ; en revanche, on peut estimer que le nombre des postulans a triplé ; d’où il suit qu’en 1800, dans les hôpitaux et hospices, pour plus de six enfans, infirmes ou malades, il y a moins d’une place.


V.

Sous ce cri des misérables qui implorent en vain des secours, des soins et un lit, on entend une plainte plus sourde, mais plus vaste, celle des parens qui ne peuvent plus donner d’instruction à leurs enfans, filles ou garçons, aucune instruction, ni la secondaire, ni la primaire. — Avant la révolution, « les petites écoles » étaient innombrables : dans la Normandie, la Picardie, l’Artois, la Flandre française, dans la Lorraine et l’Alsace, dans l’Ile-de-France, la Bourgogne et la Franche-Comté, dans les Dombes, le Dauphiné et le Lyonnais, dans le Comtat, les Cévennes et le Béarn[1], on en comptait presque autant que de paroisses, en tout probablement 20,000 ou 25,000 pour les 37,000 paroisses de France, et fréquentées, efficaces ; car, en 1789, 47 hommes sur 100, et 26 filles ou femmes sur 100 savaient lire et pouvaient écrire ou du moins signer leur nom[2]. — Et ces écoles ne coûtaient rien au trésor.

  1. Abbé Allain, l’Instruction primaire en France avant la révolution, et Albert Duruy, l’Instruction publique et la Révolution, passim.
  2. Statistique de l’enseignement primaire (1880). ir, cciv. La proportion des lettrés et des illettrés a été constatée dans soixante-dix-neuf départemens et à diverses périodes, depuis l’an 1680 jusqu’à l’an 1876, d’après les signatures de 1,699,985 actes de mariage.. — Dans le Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire, publié par M. Buisson, M. Maggiolo, directeur de cette vaste statistique, a donné la proportion des lettrés et des illettrés pour les divers départemens; or, de département à département, le chiffre fourni par la signature des actes de mariage correspond assez exactement au nombre des écoles constaté d’ailleurs par les visites pastorales et par les autres documens. Les départemens les plus illettrés sont le Cantal, le Puy-de-Dôme, la Nièvre, l’Allier, la Vienne, la Haute-Vienne, les Deux-Sèvres, la Vendée et les départemens de la Bretagne.