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d’articles locaux et d’articles empruntés aux journaux de Paris. Quelques annonces anglaises se mêlent aux annonces françaises ; et les journaux français de Guernesey publient même quelquefois des articles anglais.

L’enseignement secondaire se donne dans des établissemens entièrement anglais, et le français n’y tient pas plus de place que dans les établissemens analogues d’outre-Manche. Il devrait en être autrement dans les écoles primaires (ou élémentaires, comme on dit là-bas) ; mais l’enseignement du français y était tellement négligé que, pour lui donner plus d’importance, les états de Jersey, par une loi du 21 février 1872, ont décidé qu’une somme d’argent serait annuellement accordée pour encourager l’enseignement de la langue française dans les écoles élémentaires, et que cette somme serait distribuée d’après le rapport d’un inspecteur[1]. Depuis plusieurs années, ces fonctions d’inspecteur sont confiées au Révérend Ed. Luce, recteur de Sainte-Marie, un des plus zélés (et peut-être un des derniers !) défenseurs de la langue française dans l’île de Jersey. Ses rapports annuels sont publiés aux frais des états, et on peut y voir que les résultats ne sont guère satisfaisans.

L’examen pour le français suit immédiatement l’examen annuel pour l’instruction générale. En 1886, 2,457 élèves furent présentés à ces examens (dont 691 au-dessous de sept ans), et 813 livres sterling furent distribuées aux écoles, en subventions, pour l’enseignement du français ; mais, depuis plusieurs années, les examens sont moins satisfaisans, et M. Luce le constate par l’abaissement de la moyenne des points. Pourtant, pour améliorer cet enseignement, les états avaient décidé qu’à partir du 1er mai 1886 « aucune subvention pour le français ne sera accordée à une école, à moins que la personne enseignant le français pendant l’année qui précédera l’inspection n’ait été muni ou munie d’un brevet de capacité pour l’enseignement de la langue française. » Pour faciliter l’obtention de ce brevet, le comité des états a établi un cours supérieur « ouvert au corps enseignant des différentes écoles subventionnées par les états, » cours confié à un professeur français établi depuis longtemps dans l’île, M. P. Bouchet. Un certain nombre « d’élèves enseignans » suivent ce cours qui devrait être « supérieur, » mais nous croyons savoir que la préparation insuffisante de la plupart des élèves en fait un cours plutôt « inférieur » que « supérieur. »

  1. Ces questions sont résolues par le Règlement sur l’enseignement de la langue française dans les écoles élémentaires (adopté par le comité le 11 septembre 1885). L’article 2 est ainsi conçu : « Pour qu’une école élémentaire ait droit à ladite subvention en somme d’argent, la langue française devra être enseignée à tous les élèves dans ladite école. »