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ici pour les fêtes du 15 et, sans m’informer davantage, je m’accommodais très volontiers de la bonne chance de vous revoir pour vous serrer les deux mains très cordialement et vous féliciter chaudement de la belle campagne que vous venez de terminer, en même temps que la guerre d’Afrique, comme on finit une fête par un bouquet superbe et brillant. Cette glorieuse expédition dans les terrains les plus ardus, les plus difficiles de la Kabylie et de l’Afrique, contre les populations les plus sérieusement guerrières, et avec un succès éclatant, non interrompu, doit vous avoir laissé au cœur une joie bien légitime à laquelle je vous prie de me permettre de m’associer de toute mon âme. Il n’y a ici dans l’armée et dans la société qu’une voix, qu’un concert d’éloges à votre adresse et à celle de votre admirable armée.

« Après la grande affaire de la conquête, ce sera aussi une grande affaire d’organiser solidement et d’administrer sagement les Kabyles; mais j’augure bien de leur caractère décidé. Une main loyale et ferme doit leur convenir; ils sont plus braves et moins changeans que les Arabes. Pauvres et travailleurs, ils se plieront mieux à nos méthodes. Loyauté et fermeté dans l’administration et beaucoup de travail offert à leur activité, voilà, je pense, ce qui convient pour qu’ils restent en paix. Puisque vous avez adopté le commandement direct sans intermédiaire de grands chefs indigènes, je serais heureux d’apprendre que ce régime est poussé dans ses limites extrêmes. La division du commandement s’accommode très bien avec le caractère fier et chatouilleux du Kabyle et peut devenir une garantie contre les révoltes en masse. »

L’autorité morale du maréchal Bosquet était considérable ; son assentiment, qu’il ne prodiguait pas, n’était point banal. S’il complimentait le maréchal Randon, c’est que le compliment était juste et mérité. Après le maréchal Bugeaud, qui domine tout, après lui, mais à distance,


Proximus huic, longo sed proximus intervallo,


le second rang dans l’histoire de la conquête appartient de droit au maréchal Randon. Au génie de l’un a succédé la persévérance de l’autre; celui-ci a parachevé l’œuvre de celui-là. C’est un grand honneur.


VIII.

Toute l’Algérie était soumise. Du nord au sud, de la Méditerranée au désert, du levant au couchant, du beylik tunisien au sultanat