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alors que l’on eut l’idée excellente de convoquer une conférence générale, d’appeler les gouvernemens qui se targuent de civilisation et de solliciter leur avis sur les propositions que l’on comptait leur soumettre. Il n’était que juste, du reste, de consulter sur un objet de cette importance les nations militaires pour lesquelles la guerre semble être le moyen le plus précieux de s’agrandir moralement et matériellement. La conférence s’ouvrit à Genève le 20 octobre 1863, M. Dunant put être satisfait : l’Autriche, l’Espagne, la France, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, la Prusse et six autres états allemands, la Suède et la Suisse, la bonne initiatrice, s’étaient fait officiellement représenter. En outre, la Belgique, le Danemarck, l’Italie, le Portugal, avaient envoyé des adresses de félicitations et d’encouragement.

On avait répondu à l’appel de Genève, ce qui est pour étonner ; mais ce qui est bien plus extraordinaire, c’est que l’on se mit d’accord et que, sous la présidence du général Dufour, un des hommes les plus considérés de son temps, quatorze gouvernemens, d’origine et de tendances différentes, s’unirent dans une pensée commune de libération du mal. Avec une habileté remarquable et voulant faire œuvre vivace, la conférence, en adoptant les « résolutions » qui allaient devenir loi internationale, resta dans les généralités, reconnut la hiérarchie des services militaires, n’empiéta sur aucun, ne voulut que leur venir en aide, déclara que toute partie belligérante avait des droits égaux à l’assistance sanitaire, et s’en rapporta aux souverains pour déterminer le mode d’action des sociétés de secours formées dans leurs états. En un mot, on promulguait un programme d’humanité ; c’était aux gouvernemens à l’appliquer selon leurs lois, selon leurs coutumes, mais pour le plus grand bien de tous. Le 22 août 1864, les délégués, — on peut dire les plénipotentiaires, — ayant écarté toute objection et réduit toute difficulté, signèrent « la convention de Genève pour l’amélioration du sort des militaires blessés en campagne. » Elle est composée de dix articles dont les principaux sont : « 1° les ambulances et les hôpitaux militaires sont neutralisés ; 2° le personnel des hôpitaux et des ambulances participe à la neutralité ; 3° le personnel sanitaire pourra continuer son service après l’occupation de l’ennemi ou se retirer ; 4° le service sanitaire en se retirant ne pourra emporter que ses objets personnels ; les ambulances, au contraire, conservent leur matériel ; 5° les habitans portant secours aux blessés seront respectés et seront dispensés du logement militaire ; 6° les blessés des parties belligérantes seront remis aux avant-postes ou rapatriés s’ils sont reconnus incapables de reprendre le service. » Il était nécessaire d’adopter un signe distinctif qui fit reconnaître