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président aurait pris le nom de maire de Paris. Nous avons vu aussi les conflits entre la chambre et le sénat au sujet du scrutin de liste par grandes sections ou par arrondissement, qui ont abouti au maintien du scrutin uninominal par quartier, les projets de M. Goblet, de M. Folliet, qui accordent au conseil certaines franchises et des privilèges assez étendus.

Naturellement, les municipaux ne demeurent pas inactifs : MM. Sigismond Lacroix, Yves Guyot, Hovelacque, n’ont pas manqué de nous édifier sur un système qu’on pourrait appeler l’absolutisme communal. « Toutes les libertés nous manquent, gémit M. Hovelacque ; nos institutions sont contre-révolutionnaires, antirépublicaines, et le « vain jeu du parlementarisme ne nous illusionne pas sur l’absence des franchises. Le veto du pouvoir exécutif ôte à Paris toute indépendance, toute force et tout ressort… Il faut achever la laïcisation ; nous dirigerons l’assistance. Maîtres de la police, nous en finirons avec le régime consulaire. Nous voulons l’autonomie financière, le droit absolu d’établir les taxes municipales ; alors seulement nous pourrons supprimer les octrois, dégrever les pauvres et frapper les riches. Quant aux travaux, nous les entreprendrons dans des conditions favorables aux ouvriers, a car nous ne voulons plus que la société du XIXe siècle ressemble à une agglomération de barbares où chacun se trouve en garde contre son voisin… Paris affranchi saura, par son exemple, engager la nation dans la voie des réformes sociales. » Il y a un siècle, M. Hovelacque s’appelait Pache ou Chaumette.

Devenu député, M. Sigismond Lacroix a porté devant la chambre les revendications des quatre-vingts, et son projet est intéressant à plus d’un titre. On dirait d’un chercheur de pierre philosophale qui a passé par l’École polytechnique ; on croirait lire ce conte d’Edgar Poë où, partant d’une hypothèse impossible, l’écrivain fait jaillir mathématiquement mille prodiges et découvertes incomparables. Scrutin de liste par arrondissement, représentation proportionnelle au chiffre de la population, droit de valider ou d’invalider les élections, régime parlementaire introduit dans la commune, pouvoir exécutif confié à un conseil de mairie composé du maire, de huit adjoints élus, révocables par l’assemblée et remplaçant les deux préfets, chacun des adjoints placé à la tête d’un service municipal, le conseil de mairie nommant et destituant les employés ainsi que les maires d’arrondissement, autonomie financière, autonomie scolaire, direction suprême de l’assistance publique, de la force armée qui constitue la police communale, le conseil délibérant souverainement sur toutes les affaires d’intérêt communal, donnant des avis sur les autres, créant des universités, le peuple