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d’Alexandre. Houen-Tsang, qui visita Balk, l’ancienne Bactres, au commencement du VIIe siècle, y trouva cette mission encore florissante. Elle avait poussé des rameaux jusque dans l’Asie-Mineure. Après Alexandre et ses successeurs immédiats, les races tartares qui sont au nord-ouest de l’Inde adoptèrent avec une grande ardeur le bouddhisme ; par elles il devint la religion dominante au centre de l’Asie. Nous rappelons, seulement pour mémoire, qu’au temps de Jésus-Christ, le roi de Cachemire, Kanishka, appelé Kanerkis par les historiens, tint un quatrième concile, qui fixa la tradition du Nord. Les habitans du Cachemire étaient de race aryenne, mais le roi était probablement tartare. L’empire des Parthes, fondé par Ar-sace en 250, l’année même du concile de Patna et du message d’Açôka, s’étendit sur cette vaste contrée, qui touche d’une part à l’Indus, de l’autre au Tigre et à l’Euphrate, et qui est proprement l’Asie centrale. Cet empire dura cinq cents ans, tint tête aux Romains et défit leurs meilleurs généraux.

À cette époque, le polythéisme gréco-romain se défendait partout contre l’invasion d’idées d’origine étrangère, contre le monothéisme des Sémites et contre le dualisme panthéistique de la Perse. La lutte ressemblait à celle que le polythéisme des brahmanes soutenait en Orient contre le bouddhisme, car les divinités brahmaniques sont analogues et souvent identiques aux dieux gréco-romains. Les missions bouddhistes, en pénétrant dans l’empire des Parthes, y rencontrèrent les mages, dont la métaphysique, la morale et les institutions avaient la plus grande analogie avec les leurs. Ormuzd et Ahriman représentaient les principes du bien et du mal comme le Bouddha et Mâra. Le clergé des mages comptait trois degrés et un noviciat comme celui des bouddhistes ; l’ascétisme était le même de part et d’autre. Les êtres idéaux ou Puissances célestes, qui furent ces bons et ces mauvais anges connus sous les noms d’amshaspands et de darvands, y répondaient aux nâthas ou anges gardiens et à l’armée de Mâra. Quant à un être unique et suprême, c’était pour les uns et les autres une expression abstraite et savante qui n’était l’objet d’aucun culte. La fusion du bouddhisme et du mazdéisme put donc se faire pour ainsi dire d’elle-même. Le premier apportait toutefois deux idées que la religion de Zoroastre n’avait pas eues ou n’avait pas mises en lumière, la charité comme base de la société humaine, la catholicité comme caractère de la foi.

Au sud-ouest, le monde sémitique luttait contre les dieux gréco-romains et contre ceux de l’Egypte. Mais il faut observer que, depuis l’ouverture de la vallée du Nil par Psammétik et surtout depuis Darius et Cambyse, la terre des Pharaons était bien déchue ; que les Ptolémées, en adoptant les modes de l’Egypte, n’en avaient pas pour cela adopté les dieux ; que les peuples assyriens avaient