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triomphal et sa reconnaissance envers Iahvé. Mais aucun des Psaumes ne paraît sérieusement pouvoir lui être attribué. Une exception semblerait devoir être faite pour le Psaume XVIII, qu’on lui prêtait, au moins dès le temps d’Ézéchias. La plus grande partie de ce morceau est l’ouvrage d’un anavite ou piétiste. Il y a cependant quelques versets dont on peut dire que, s’ils ne sont pas de David, David du moins en a dû souvent proférer de semblables. — Un fragment, répété dans deux Psaumes[1], aurait plus de chance de nous représenter une éructation poétique du temps du premier roi d’Israël :


Dieu a dit en son sanctuaire :
Or sus ! je veux me partager Sichem,
Mesurer au cordeau la vallée de Succoth
A moi Galaad ! à moi Manassé !
Éphraïm est la tour crénelée de ma tête,
Juda est mon sceptre.
Moab est le bassin où je me lave les pieds ;
Sur Édom, je jette ma sandale ;
Sur les Philistins, je pousserai des cris de triomphe.
Qui me conduira à la ville forte[2] ?
Qui saura me mener à Édom ?


Pendant des siècles, ce genre dithyrambique, fondé sur la sonorité des noms géographiques et l’agencement habile d’un petit nombre de mots poétiques, continua de fleurir, presque dans les mêmes termes, chez les nations sémitiques de la Syrie. La date de pareils poèmes est souvent difficile à assigner, et elle est presque indifférente à savoir. Que le petit morceau que nous venons de citer soit ou né soit pas de David, cela n’a pas grande portée, puisque, si David ne composa pas mot pour mot ce morceau tel qu’il est, il chanta ou plutôt il déclama d’une manière qui avait avec ledit morceau la plus complète analogie.


V

Le règne de David marqua dans le progrès du iahvéisme un pas considérable. David paraît avoir été un serviteur de Iahvé bien plus exclusif que Saül. Iahvé est son protecteur ; il n’en veut pas d’autre. Il a un pacte avec Iahvé, qui doit lui donner la victoire sur ses ennemis, en retour de l’assiduité de son culte. Pas un mouvement de

  1. Psaumes LX, 8-11 ; CVIII, 8-11.
  2. Probablement Pétra.