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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 mai.

S’il ne fallait que des mots, des polémiques, des discours, des contre-manifestations pour conjurer un danger qui peut menacer la république, et quelque chose de plus sacré que la république, la liberté et la France, on pourrait se rassurer : nous avons tout ce qu’il faut!

Les journaux épuisent tous les matins et tous les soirs leur éloquence à démontrer que la dictature est impossible, que le personnage qui joue pour le moment les césars n’est qu’un charlatan de popularité, que revenir au plébiscite et au gouvernement personnel quatre-vingts ans après la révolution, moins de vingt ans après Sedan, serait une déplorable rétrogradation. Les ligues antiplébiscitaires ne manquent pas plus que les déclarations et les programmes. M. le président du conseil, qui a voix au chapitre, est allé l’autre jour au Champ de Mars inaugurer une exhibition archéologique de la vieille Bastille, et il a fait son mot sur les « idoles de quinze jours, » sans doute par réminiscence des pêches à quinze sous de M. Dumas. M. le ministre de l’agriculture Viette vient de rendre visite à la ville d’Auch, — non loin de la Garonne, — Et dans un discours de circonstance il a joyeusement déclaré que les orages se dissipent, que « la concentration républicaine n’est plus un rêve, » que nous marchons à grands pas vers la liberté, qu’il n’y a plus rien à craindre. M. Brisson lui-même, le grave et sibyllin M. Brisson, a pris le train pour Lyon, où il est allé porter la bonne parole aux populations, prêcher contre la dictature et pour le ministère Floquet, — En avertissant surtout les républicains ses frères de se bien garder de toute alliance avec les conservateurs! La franc-maçonnerie, qui est une puissance, a parlé, elle aussi; elle a fait ses