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bientôt fauchés. Il y a des champs où le blé va donner 12 à 14 hectolitres à l’hectare ; l’avoine, 20 à 28 ; sur d’autres, le blé fournira 30 à 35 hectolitres à l’hectare; l’avoine, 40 à 50, ou davantage encore. Ne serait-il pas bon que le jeune homme, dût-il par la suite être bien éloigné de la vie rurale, garde l’impression d’une pareille différence? Qui ne sait, en effet, combien il restera toujours instructif de comparer au champ entretenu selon la vieille routine le champ productif, parce que le terrain a reçu les substances chimiques convenables, parce que le choix des semences n’a pas été décidé au hasard, parce que tous les procédés scientifiques ont été mis en usage?

En plein air, combien de leçons de chimie et de physique peuvent être rendues attrayantes ! Où mieux qu’à la campagne observerait-on l’eau dans ses aspects variables et dans ses différens états? En quelque endroit, sous la futaie, on voit sourdre l’eau claire, transparente comme le pur cristal, tandis qu’à la rivière ou sur l’étang elle se montre verte comme si elle empruntait sa couleur aux feuillages d’alentour. Après une crue, mêlée à du limon, elle aura pris la teinte triste qui dénonce une souillure. Pendant la grande chaleur, en présence d’une mare, on va reconnaître l’eau qui se convertit en vapeur, la vapeur qui, de la surface terrestre, s’élevant dans l’espace pour former les nuages, doit retomber en pluie, la vapeur qui, à certaines heures, par suite d’une inégalité de température des couches de l’atmosphère, séjourne dans la vallée, s’emparant de l’air qu’on respire ; alors, elle est le brouillard. Au soir, par la nuit claire, on voudra examiner la vapeur chaude se dégageant du sol, qui, bientôt refroidie, se condense et devient la rosée, si précieuse dans les temps de sécheresse pour conserver un peu de fraîcheur à la végétation. En hiver, ne manque pas l’occasion d’un entretien sur l’eau passée à l’état solide, la glace, la neige, la grêle. A médiocre distance du lycée, il existe un marécage où se décomposent les matières organiques. Dans l’obscurité d’une nuit profonde, sur la nappe liquide, voltigent de petites flammes, et les écoliers ont entendu les gens des villages voisins parler avec une sorte d’effroi des feux follets. Ils sont fort intrigués ; ils seront ravis si, entraînés sur les lieux, ils aperçoivent les feux follets, tout en apprenant la formation du gaz des marais aussi bien que ses propriétés. En promenade, on s’arrête devant une bâtisse en construction; une fosse a été creusée pour la préparation du mortier. Où trouver instant plus favorable pour instruire les élèves au sujet de la chaux, pour signaler les caractères de la substance, sa diffusion dans le sol, son emploi, son traitement? Le jour où il s’agit de traiter de la pesanteur, les incidens se multiplient pour fournir des exemples. Des feuilles et des fruits tombent à terre avec une vitesse fort inégale; ainsi se démontre la résistance de l’air.