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s’attachaient à l’arbre dont l’existence datait de plusieurs siècles, dont l’ombrage avait été recherché de vingt générations d’hommes. Par la pensée revivront les poétiques hamadryades de la Grèce, les sombres druides des Gaules, pratiquant de mystérieuses cérémonies. Vers la fin de l’été, alors que les glands, à la forme gracieuse et singulière, jonchent la terre, une telle abondance dira que, si quelques-uns doivent germer, la plupart serviront à la pâture des bêtes sauvages, comme autrefois ils servaient à la nourriture de nos ancêtres. Devant le hêtre, le compagnon, et, par ses caractères, l’allié du chêne, nous verrons nos élèves admirer son tronc à l’écorce lisse et sa large cime. Ils apprendront les services que le bois rend pour nos foyers, pour l’industrie, pour les constructions navales, le profit que l’on tire des fruits, les faines donnant l’huile aux populations de l’Europe tempérée.

Une autre fois, l’excursion scientifique a pour objectif une belle mare, une sorte d’étang encadré de beaux arbres : c’est une des plus délicieuses parties de la forêt. On arrive, et dès qu’on aperçoit la nappe d’eau toute chatoyante par l’effet de l’ombre et de la lumière, une impression suave prend l’esprit, une jouissance monte au cœur. En cet endroit, presque tous les hôtes de la forêt sont rassemblés, les insectes sont plus nombreux que sous la futaie, les bourdonnemens répondent aux notes les plus variées. Nulle part, les oiseaux qui viennent se désaltérer ne se montrent plus en fête. Les cris et les chants se mêlent. C’est la vie sous tant de formes ! Sur cette mare s’étalent les larges feuilles et se dressent les fleurs des blancs nénuphars, les lis d’eau, comme se plaisent à les nommer ceux qui, par analogie, appliquent le nom d’un objet bien connu à un objet qui tombe moins souvent sous l’observation. On rappellera que les nénuphars sont de la famille de ces plantes que vénéraient les anciens Égyptiens, le lotus du Nil, et que vénèrent aujourd’hui les peuples de l’extrême Orient, le nelumbo des rivières de l’Inde et de la Chine. Sur un point de l’étang, l’iris des marais aux fleurs jaunes s’offre aux regards comme un type tout particulier de la végétation. Les joncs fleuris aux lourds panicules d’un rose pâle[1], les massettes noirâtres qui dominent à côté des joncs fleuris et contrastent par la simplicité de leur allure, achèvent de fournir à la leçon de botanique.

À ce moment même ou un autre jour, si l’heure est venue de quitter la place, il faudra considérer les êtres animés. De la main ou avec le moindre filet, on s’empare de mollusques. Voilà les limnées

  1. Butomus umbellatus.