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repoussés avec succès, et il a été utilement secondé par le ministre des finances, M. Dunajewski, Le ministère aura son budget, cela n’est pas douteux ; mais avant d’arriver au bout de la session, qui ne doit pas durer longtemps, il a plus d’une discussion délicate à soutenir, plus d’une difficulté à surmonter. Il a d’abord à faire voter une nouvelle loi militaire qui donne notamment à l’empereur le droit de retenir ou de rappeler sous les drapeaux les hommes qui ont déjà fait leurs trois ans de service, et qui pourraient être gardés un an de plus. C’est le complément d’une série de lois toutes destinées à augmenter les forces militaires de l’Autriche, et la loi nouvelle sera, selon toute apparence, d’autant moins contestée, qu’à Vienne même on n’a pas toujours une confiance complète dans la coopération de l’Allemagne. Le ministère a encore à obtenir le vote d’une loi qui crée des ressources nouvelles par une augmentation de l’impôt sur l’alcool, et ici il a rencontré tout d’abord l’opposition redoutable des députés polonais, défenseurs naturels d’une industrie puissante en Galicie ; mais cette opposition paraît désarmée aujourd’hui, à la suite d’une conversation que l’empereur lui-même a eue avec les chefs du parti polonais. Il y a enfin une proposition du prince Liechtenstein, qui ne tend à rien moins qu’à replacer les écoles primaires sous la surveillance de l’église et à décentraliser l’enseignement en le rendant à la direction des pouvoirs locaux. Le projet Liechtenstein, qui désarme à peu près complètement l’autorité centrale, est assez habilement combiné pour rallier les conservateurs et les représentans de toutes les nationalités, les Tchèques surtout, qui poursuivent d’une guerre implacable le ministre de l’instruction publique de Vienne. Voilà donc un certain nombre de difficultés pour le gouvernement dans ses relations avec son parlement. Les unes, il est vrai, sont déjà à demi vaincues ; les autres le seront sans doute, ou elles seront écartées par quelque ajournement opportun. Elles révèlent, dans tous les cas, une situation qui fait une existence laborieuse au ministère du comte Taaffe, qui ne laisse point aussi d’être un embarras pour la politique de l’Autriche en Europe.

Que la reine Victoria voyage pour son plaisir ou pour sa santé en Italie, et qu’elle revienne aujourd’hui de Florence à Londres, en passant par Berlin, il n’en est ni plus ni moins en Angleterre. L’absence momentanée de la souveraine ne change rien. Les affaires de l’empire britannique n’en sont pas interrompues, elles suivent partout leur cours sans embarras et sans trouble. Le ministère gouverne, le parlement délibère. Les questions les plus sérieuses sont débattues tous les jours. Le chancelier de l’échiquier, M. Goschen, discute avec M. Gladstone son budget, qu’on pourrait trouver habilement conçu, si la France n’en payait un peu les frais par la surtaxe mise sur ses vins. La vie nationale se déploie dans toute sa liberté, que la reine soit absente ou présente.