Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 87.djvu/221

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
REVUE LITTERAIRE

SUR l’ÉLOQUENCE JUDICIAIRE.

Les Époques de l’Éloquence judiciaire en France, par M. Munier-Jolain, avocat à la cour d’appel. Paris, 1888; Perrin.

Pour un bon livre, on ne peut pas dire que ce soit un bon livre que celui de M. Munier-Jolain sur les Époques de l’éloquence judiciaire en France; on ne peut même pas dire que ce, soit un livre très intéressant; mais il aurait pu l’être, et la question qu’il soulève est curieuse. D’où vient, en effet, dans la plupart de nos histoires de la littérature, comme dans nos Recueils de Morceaux choisis, tandis que nos sermonnaires et nos orateurs politiques y tiennent une si large place, — Trop large même quelquefois, — d’où vient que l’on mesure si parcimonieusement à nos plus fameux avocats, non pas même la louange, mais les analyses et les citations ? quand ce ne serait que pour les critiquer, pourquoi n’y parle-t-on point davantage des Lemaistre et des Patru, des Loyseau de Mauléon, des Elie de Beaumont, des Dupin et des Chaix d’Est-Ange? Et quelle est enfin la raison, s’il y en a une, depuis quatre ou cinq cents ans, je ne dis pas de cette injustice, mais de cette apparente inégalité de traitement ? Les avocats en sont un peu blessés; — Et on s’en aperçoit bien dans l’Avant-propos, emphatique, mais tout de même amer, du livre de M. Munier-Jolain.

C’est donc lui-même ce qu’il n’aurait pas mal fait de rechercher d’abord, au lieu d’accuser la critique d’ignorance, de négligence dédaigneuse, et de «mépris affecté» pour l’éloquence du barreau; puisque aussi bien c’est de là que dépendait l’intérêt de son livre. On ne nous