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autant d’innovations introduites dans la vie civile, simultanément avec l’abolition de la bastonnade dans l’armée et avec l’admission des sujets de toutes les classes aux grades d’officier, réservés jusqu’alors à la seule noblesse. Jamais une pareille harmonie d’efforts combinés entre gouvernans et gouvernés ne s’était vue avant cette révolution pacifique, accomplie au milieu du deuil national. L’armée, reconstituée sous de tels auspices, devenait une armée réellement populaire, unie à son souverain par la conscience d’assurer le salut public, en faisant ensemble cause commune avec une égale abnégation.

La loi sur l’organisation de la landwehr est datée du 3 septembre 1814 ; l’ordonnance du 6 août 1808 fixe les conditions pour la nomination aux charges d’officiers. Ces deux actes proclament également l’un et l’autre le principe de l’obligation au service militaire pour tous les citoyens jouissant de la protection de l’état. Toutes les prescriptions essentielles de la constitution militaire en vigueur aujourd’hui dans tout l’empire allemand se trouvent exprimées en termes plus ou moins nets dans la loi organique de 1814. Touchant les conditions de l’avancement dans l’armée, l’ordonnance de 1808 décidait que : « A partir de maintenant, donneront seuls droit aux emplois d’officiers l’instruction et l’éducation en temps de paix ; en temps de guerre, le coup d’œil et une valeur signalée. Tous les individus de la nation entière qui possèdent ces qualités peuvent ainsi prétendre aux fonctions honorifiques les plus hautes dans l’armée. Les privilèges de classes admis jusqu’à présent dans l’armée sont complètement écartés, et chacun, sans considération d’origine, a les mêmes devoirs et les mêmes droits. » D’un autre côté, l’application définitive de l’obligation universelle, mise en vigueur par la loi de 1814, en imposant à tous les citoyens de contribuer à la défense du territoire, avait pour but de développer la valeur individuelle des troupes autant que d’augmenter leur nombre. Incorporés avec les fils de paysans et d’ouvriers, les jeunes gens des classes supérieures pourvus d’une bonne éducation et instruits doivent améliorer, par un contact de tous les jours, leurs camarades moins favorisés. Le niveau intellectuel et moral s’élève ainsi pour l’ensemble, au profit de sa capacité militaire. Enfin, la formation de l’armée nationale sur la base du service obligatoire pour tous les citoyens du pays a mis un terme à l’engagement des mercenaires étrangers.

Déjà, avant cette réorganisation, les inconvéniens de l’emploi de soldats étrangers étaient devenus manifestes. La commission instituée pour préparer le projet de réformes militaires, devenues indispensables après les défaites de Jemmapes et de Valmy, proposa