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l’adoption d’une mesure analogue en faveur de fils de chefs influens de la région du Niger, appelés, d’après l’opinion du lieutenant-colonel Gallieni, à devenir d’incomparables agens de pénétration dans ce continent noir, demeuré si longtemps et si obstinément fermé à nos explorateurs. Ce serait continuer sous une autre forme ce qui se fît autrefois. Le général Faidherbe, pendant son gouvernement au Sénégal, ne manqua pas d’y créer des écoles d’enfans indigènes. Elles prospéraient, les négrillons s’y montraient intelligens et dociles, lorsque son successeur, aussitôt débarqué à Saint-Louis, se hâta de les fermer. A cela rien d’étonnant ; mais ce qui peut surprendre et flatter notre amour-propre national, c’est que de nos jours encore, dans un village perdu de l’Afrique, l’on soit brusquement abordé par un nègre à tête blanche et qui vous dira, avec une fatuité comique : « Bonjour, capitaine ! » C’est un élève des écoles créées par l’honorable général.

Mais pour fonder, dira-t-on, un établissement qui puisse recevoir un grand nombre d’élèves, il faudra beaucoup d’argent, et alors, en raison de la pénurie de nos finances, cette fondation menacera d’être indéfiniment ajournée. Je ne vois pas que la question financière soit un obstacle, puisqu’elle sera tranchée par la participation de toutes les colonies au budget de l’institution. La métropole ne doit en ceci être contrainte à aucun sacrifice d’argent. Les dépenses seront divisées entre toutes nos possessions, établies proportionnellement selon le nombre des boursiers que chacune d’elles entretiendra à Paris, et les dépenses de l’instruction dans un budget colonial n’ont jamais été lourdes ni jamais discutées.


EDMOND PLAUCHUT.