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manque pour tous les services. Il en est de même ailleurs. Le gouvernement s’est ému, trouvant que les logemens étaient devenus excessifs ; une commission de révision a été nommée, et a reconnu qu’au lieu des 100 à 200 concessions qui auraient dû être faites, il y a, tant en France qu’en Algérie, 4,000 à 5,000 directeurs, caissiers, archivistes, chefs de bureau, ouvriers, logés dans des immeubles nationaux, sans que leurs fonctions l’exigent. Des conservateurs et surveillans de musée, dont la concession est motivée par une présence soi-disant indispensable auprès des collections, sont effectivement logés, mais fort loin : ceux du Louvre habitent les écuries de l’Alma, voisines du Champ de Mars. Et comme une faveur en appelle une autre, l’habitation entraîne l’éclairage et le bienfaisant chauffage. Dans l’armée, il est fait une retenue proportionnelle sur la solde de tous les officiers logés ; dans le service civil, le loyer est purement gracieux. La commission proposa, par l’organe de son rapporteur, M. Escande, de supprimer tout de suite 543 concessions; mais tout porte à croire que ce vœu demeura lettre morte. Le ministère adopta un autre système : la loi de finances de 1887 proposait de ne plus insérer au Journal officiel la liste des logemens accordés. Au lieu de la réforme, on voulait faire le silence sur l’abus ; et cette combinaison eût été adoptée, certainement, sans l’intervention d’un député de la minorité, M. d’Aillières.

On se moquait avec quelque fondement, il y a dix-huit ans, de tous ces budgétivores qui, sous des noms variés, jouissaient d’aimables sinécures. Les prodigalités cachées sous les dehors pompeux de missions, souscriptions, inspections, se sont de-nuis considérablement multipliées. Notre système administratif comprend, en nombre fort respectable, des hiérarchies d’inspecteurs des finances, des contributions directes, de l’enregistrement et des domaines, des douanes, des contributions indirectes, des tabacs; des inspecteurs généraux des établissemens de bienfaisance, des maisons centrales et d’arrêt, des pénitenciers agricoles, des enfans assistés, des enfans du premier âge, de l’enseignement supérieur, secondaire, primaire, des langues vivantes, des beaux-arts, des théâtres, des musées de province, de l’enseignement du dessin, des écoles d’arts et métiers, du travail des enfans dans les manufactures, des établissemens thermaux, du service sanitaire, des pharmacies, des fabriques d’eaux minérales, des forêts, de l’agriculture, des haras, des mines, des ponts et chaussées. Après une si longue nomenclature de places, dont les unes sont nécessaires, d’autres d’une utilité fort contestable, et d’autres tout à fait superflues, le lecteur peut supposer qu’il n’y a plus rien à inspecter. Erreur ; on pourrait inspecter encore beaucoup d’autres choses, parce que, selon