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dans les luttes engagées à la Diète. Mais leurs perplexités étaient grandes : ils redoutaient d’être entraînés dans des complications par l’Autriche, et il leur répugnait de se placer sous la coupe de la Prusse.

Lo roi Maximilien, à l’encontre de son père Louis Ier, qui protégeait les peintres et Lola Montés, et de son fils Louis II, qui protégeait Wagner et les musiciens, attirait dans sa capitale les savans et les philosophes. Le roi Guillaume, lui, était un politique avisé ; il avait les qualités et les défauts du Souabe : la ruse et la bonhomie. Il eût marqué sur un trône moins exigu; réduit à un rôle secondaire, il prit l’existence en philosophe, se consacra au bonheur d’une artiste dramatique, et pour jeter un peu de poésie dans sa vie bourgeoise, il construisit, aux portes de sa capitale, un petit palais mystérieux sur le modèle de l’Alhambra, avec des peintures qui traduisaient les souvenirs les i)lus risqués de la mythologie[1].

La coalition de Bamberg, malgré les efforts de M. de Bismarck pour la galvaniser, ne battait plus que d’une aile. Elle cherchait à esquiver les responsabilités qu’elle avait encourues. La discorde était au camp d’Agramant. On s’était juré de ne jamais agir séparément et de toujours se concerter, et déjà M. de Beust et M. de Pfordten, grisés et gonflés par l’accueil qu’ils avaient trouvé à Paris, ne cédaient plus qu’à leurs intérêts personnels. L’un voulait s’affirmer dans les négociations européennes comme représentant de la Diète ; le second cherchait à imposer à ses collègues la volonté prédominante de la Bavière ; il réclamait, pour un prince de sa maison, le commandement des contingens fédéraux. Tous évitaient de s’engager et de se compromettre. Ils leurraient le cabinet de Vienne et celui de Berlin, ils attendaient les événemens de la guerre pour prendre couleur. Beaucoup étaient convaincus que la sommation autrichienne n’était qu’un coup d’épée donné dans l’eau, que le comte de Nesselrode y répondrait par des contre-propositions. « Pour contraindre la Russie à l’acceptation de l’ultimatum, disait le ministre de Saxe à Berlin, il faudrait qu’il lui fût présenté sur la pointe d’une baïonnette, et l’Autriche n’est pas assez résolue pour recourir à ce moyen extrême; c’est tout au plus si elle enverra, au cabinet de Pétersbourg, une carte avec un P. P.-C. pour lui signifier poliment la rupture des relations diplomatiques. » Il disait aussi, sans illusions sur l’importance que se donnaient les ministres dirigeans des cours allemandes : « Nous sommes, pour

  1. L’empereur le mit en joie en lui faisant hommage, après l’entrevue de Stuttgart, d’une peinture hardie, la Léda de Galimard, qui avait fait sensation au Salon de 1856.