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deux classes, ce qui est l’exception, on ajoute des notions élémentaires sur l’histoire nationale et sur l’histoire ecclésiastique. L’assistance aux offices, les dimanches, est obligatoire. A l’école pour les enfans on peut joindre, toujours avec l’autorisation épiscopale, des cours d’adultes, des sections techniques pour l’enseignement professionnel, des cours du dimanche. On y peut aussi annexer des bibliothèques populaires ; le choix des livres appartient au saint-synode. Ces écoles paroissiales sont encore trop récentes pour qu’on en puisse apprécier l’influence sur le peuple et sur le clergé. Quoiqu’elles n’aient que des moyens d’existence précaires, étant à la charge des paroisses ou des particuliers, elles ont pris un rapide développement. En quelques années, il en a surgi des milliers. Des confréries mi-religieuses, mi-patriotiques, telles que la confrérie orthodoxe de la Vierge à Saint-Pétersbourg ou la confrérie de Saint-Cyrille et de Saint-Méthode à Moscou, se sont donné pour mission d’en répandre les bienfaits. On les a vantées comme un préservatif contre l’esprit de secte. Katkof les célébrait comme un agent de russification dans les pays de nationalités ou de confessions mêlées. Ainsi, aux bords du Volga, chez les Tchouvaches ou les Tchérémisses ; et cela non-seulement dans les régions à demi asiatiques, près des « allogènes » aux trois quarts païens, mais aussi sur les frontières européennes, dans les provinces occidentales, en Lithuanie, en Russie-Blanche, en Petite-Russie. Il est des localités où, dans recelé du pope, les catholiques sont plus nombreux que les orthodoxes. On ne permettrait pas au clergé catholique romain d’ouvrir école contre école.

Au moment de la promulgation de l’ukase de juin 1884, il ne restait, dans tout l’empire, que 3,000 écoles de paroisses; six mois plus tard, le clergé avait fondé près de 2,000 écoles nouvelles, et ce mouvement n’a fait que grandir. A la voix des évêques, sur le signe du haut-procureur du synode, les écoles ont surgi par centaines dans chacun des cinquante-quatre diocèses orthodoxes de l’empire. A en juger par les dernières années, il y aura bientôt peu de paroisses qui n’en soient pourvues. Les sceptiques, il est vrai, se demandent si toutes ces écoles fonctionnent, si nombre d’entre elles n’existent pas uniquement sur les registres des consistoires. L’on est encore en Russie exposé à de pareilles mystifications. Il suffit d’un ordre ou d’un vœu des gouvernans du jour pour que les institutions encouragées en haut lieu sortent tout à coup du sol, sauf à ne jamais fonctionner que dans les rapports officiels ou à bientôt retomber dans le silence du néant. L’âge des villages improvisés de Potemkine n’est pas encore entièrement évanoui. Il se peut que, parmi ces milliers d’écoles improvisées à grand bruit, il y en ait des centaines sans