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et y fit élever une très belle maison où l’on put entrer au cours de l’année 1877. A parcourir cette maison, on reconnaît qu’elle a été construite pour une destination déterminée, elle est faite pour l’enseignement, pour l’éducation professionnelle ; l’air circule partout et la cour des récréations est accostée d’un vaste préau couvert. Elle a été, dès le début, placée sous l’autorité de M. Joseph Bloch, qui, pendant longtemps, avait été directeur de l’école israélite de Colmar, — encore un Alsacien. A sa mort, en 1833, son fils, M. Maurice Bloch, l’a remplacé et a continué les traditions paternelles, empreintes d’indulgence et d’aménité. A ma question : « Quel est votre mode de punition ? » il a répondu : « Je ne punis jamais ! »

La maison, par la disposition des classes et des dortoirs, peut abriter cinquante élèves ; elle était pleine lorsque je l’ai visitée. Les demandes d’admission ont été, dès le principe, si pressantes et si nombreuses, que l’on a dû établir un concours entre les postulantes. Donc, il faut montrer patte blanche et subir des examens avant d’avoir droit aux leçons de a l’école de travail. » Y entrer, c’est avoir donné quelques espérances dont on se charge de faire des réalités. La limite d’âge est fixée, pour l’admission, entre douze et quinze ans ; la durée des cours étant de trois années, on a terminé ses études et l’on est rendu à la liberté de quinze à dix-huit ans.


Quinze ans, ô Roméo ! l’âge de Juliette.


C’est bien jeune, et, pour des motifs qui ne sont point à expliquer, il vaudrait mieux reculer l’époque de la sortie. Tout en recevant un enseignement commun qui comprend la gymnastique, la danse, le chant, la couture, la musique et l’anglais, les élèves sont divisées en trois classes correspondant à trois catégories de fonctions : les institutrices, les commerçantes, les ouvrières. Les premières sont autorisées à prolonger le séjour à la maison pendant deux ans, jusqu’à ce qu’elles aient obtenu le brevet supérieur ; les matières dont on exige la connaissance ne découragent ni l’émulation des pensionnaires, ni celle des bienfaiteurs, qui, pour répondre aux exigences des programmes universitaires, ont été obligés de multiplier les cours faits par des professeurs spéciaux : physique, chimie, histoire naturelle, botanique, littérature, histoire ancienne, géographie universelle, géométrie, dessin, musique ; les pauvres petites cervelles s’approprient, vaille que vaille, toutes ces notions, dont la plupart sont d’une utilité contestable et qui semblent destinées moins à féconder des intelligences qu’à créer des obstacles devant une carrière trop encombrée. A quand la docimasie, la morphologie, la tératologie, la paléographie, l’hippiatrique et le calcul