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elle-même une cohésion appréciable, à plus forte raison a-t-on le droit d’attribuer cette propriété à une gigantesque agglomération de laves fondues. L’action du satellite de la terre sur ce gouffre enflammé, niée par quelques-uns, acceptée par d’autres, est assurément contestable et contestée.


IV

Soit que l’on admette la solidité de l’ensemble de la terre, soit qu’on relègue le feu interne au cœur même du globe, loin de la superficie, il faut trouver une explication plausible à toute une série de faits sur lesquels les partisans de la croûte mince s’appuient pour confirmer leurs théories. Le géologue, s’il adopte cette dernière hypothèse dans toute sa rigueur, dispose à son gré d’un abîme embrasé qui, tantôt s’abaissant, tantôt se soulevant en vagues brûlantes, a produit les froissemens, les rides, les plis de l’écorce. De ce réservoir inépuisable sont venues les matières d’origine éruptive, les granits, les laves, les basaltes ; le même foyer suffit à alimenter copieusement tous les volcans du globe jouant le rôle de soupapes de sûreté. Enfin, pourquoi nous étonner que de temps à autre il se produise des tremblemens de terre, du moment que nous habitans une sorte de radeau flottant sur une mer intérieure ; il doit forcément se propager dans cet énorme océan des ondulations dont nous ressentons le contre-coup. Certains astronomes, — Edouard Roche était du nombre, — restreignent considérablement le domaine des rocs en fusion et n’admettent pas qu’il s’étende jusqu’au centre du monde ; mais qu’importe, la part assignée suffit encore aux savans pour l’interprétation des phénomènes, et la plupart d’entre eux déclarent ne pas avoir besoin d’un noyau fluide, pourvu qu’on leur accorde seulement une couche surchauffée assez épaisse.

Sans être géologues ou minéralogistes, beaucoup de personnes n’ignorent pas que les pétrographes ont classé les roches en deux catégories jointes par un assez grand nombre de types de transition : les roches plutoniques ou éruptives, dont l’origine est attribuée au feu central, et les roches dites métamorphiques, dérivant de l’action des eaux ou d’autres causes accidentelles. Les unes ont jailli de l’intérieur telles quelles ou à peu près ; les autres se sont produites dans la suite des temps, grâce à des altérations progressives d’autres substances. Or, aujourd’hui, non-seulement la barrière élevée entre les deux séries extrêmes tend à être abaissée,