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plus modestes proportions compatibles avec la décence. Ce vêtement consiste en une ceinture étroite nouée à la taille ; les deux bouts, réunis entre les jambes, viennent se rejoindre à la ceinture au bas des reins, et, roulés en corde se terminant par deux ou trois nœuds, pendent jusqu’à terre, formant un appendice caudal d’un effet aussi original que grotesque.

Soit humilité, soit coquetterie, les jeunes filles sont rarement tatouées, sauf autour des poignets. Le reste de leur personne n’a rien d’historique, et comme elles possèdent, avec des traits réguliers et des formes attrayantes, des extrémités fines et gracieuses, une chevelure abondante, de belles dents et des yeux vifs, elles n’en brillent que d’un plus vif éclat au milieu des palimpsestes vivons qui les entourent.

Quant à leurs mœurs, elles n’en ont pas. Elles ne sont ni esclaves ni opprimées, mais libres jusqu’à l’extrême licence. On retrouve aux îles Marquises, ainsi qu’autrefois aux îles Sandwich, le signe irréfutable de l’affranchissement complet de la femme chez certaines peuplades primitives : la polyandrie. Aux Marquises, comme aux Sandwich, les femmes de rang élevé avaient autant de maris que bon leur semblait ; elles imposaient la loi de leur fantaisie au lieu de subir celle de l’homme. La civilisation est en voie de modifier cet état de choses ; mais, ainsi que nous l’avons déjà dit, il faut créer toute une langue nouvelle pour inculquer à ces races des sentimens qu’elles ignorent. Il faut leur apprendre et la chose et le mot, tâche ingrate devant laquelle n’ont pas reculé les missionnaires catholiques et protestons. On arrive ainsi peu à peu, sinon à convaincre leur esprit réfractaire, tout au moins à le façonner dans une certaine mesure, et à enseigner aux jeunes générations des idées que leurs ancêtres n’ont pas même soupçonnées.

Paresseux avec délices, comme la plupart des Polynésiens, les habitans des Marquises travaillent le moins possible et uniquement en vue de gagner la somme nécessaire pour satisfaire quelque caprice ou quelque fantaisie du moment. Le climat leur impose si peu de besoins, le sol pourvoit si abondamment à leur nourriture, qu’exempts d’inquiétudes pour le présent, sans soucis pour l’avenir, ils se laissent aller au charme de leur incomparable climat. L’industrie de l’archipel se borne à l’élevage du bétail et à quelques plantations de coton.

Dans une étude précédente[1], nous avons en l’occasion de parler de Tahiti, nous n’y reviendrons donc pas. Faisant route vers l’ouest, vers le continent australien, nous relevons entre le 20e et

  1. Voyez la Revue du 15 mars 1881.