Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 82.djvu/817

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dépenses des deux services, étaient prévues à près de 150 millions ; les recettes étaient évaluées, à 135,678,000’francs pour les postes, et à 30,730,000 francs pour les télégraphes, soit, ensemble à un peu plus.de 166 millions. On n’osait donc espérer un produit net supérieur à 16 millions, tandis qu’en 1869, la seule administration des postes, avec une dépense de 63 millions, faisait une recette de 85,807,000 francs, ce qui lui donnait un bénéfice de 22 millions ½ ou de 25 pour 100. Cependant elle avait établi, depuis 1863, le service quotidien dans toutes les communes ; elle payait 23 millions 1/2 de subventions aux compagnies de navigation ; enfin, elle avait à supporter les frais de nombreux services en voiture pour des correspondances que les chemins de fer transportent aujourd’hui gratuitement. C’est à plus de 20 millions que le ministère des travaux publics a évalué les dépenses dont les postes se sont déchargées sur les compagnies de chemins de fer, et, en fin de compte, sur les contribuables par le mécanisme des garanties d’intérêts. Malgré ces allègemens, le produit net des postes a décru d’année en année, et l’on peut presque prévoir le jour peu éloigné où les recettes, malgré leur progrès, se trouveront inférieures aux dépenses. L’explication de ce fait anormal n’est pas difficile à trouver. Tantôt par une imitation intempestive de ce qui se pratique à l’étranger dans des conditions toutes différentes des nôtres, tantôt par recherche de la popularité, l’administration des postes et télégraphes a cessé de se conformer aux principes qui s’imposent à toute exploitation commerciale. Elle ne s’est plus souvenue qu’elle n’avait pas le droit de disposer d’une partie du revenu public ; elle n’a plus calculé si les dépenses qu’elle engageait seraient reproductives.

L’amalgamation des deux services des postes et des télégraphes, de qui on attendait une économie s’est traduite par une augmentation notable de frais. On a créé avec grand fracas des services nouveaux, tels que l’abonnement aux journaux, le recouvrement des traites, la caisse d’épargne postale, qui ne sont utiles qu’à une très minime partie de la population et qui sont indifférens à la grande masse du public. Il en résulte que ces services donnent un très maigre produit et coûtent infiniment plus qu’ils ne rapportent, parce qu’ils ont entraîné un accroissement dans les frais généraux et l’augmentation d’un personnel qui, malgré la honteuse modicité de sa rémunération, n’en représente pas moins, à raison de son nombre, une dépense assez considérable. Cette dépense ne cesse de s’accroître. Pour la seule caisse d’épargne postale, dont les frais d’administration montaient déjà à 593,000 francs, le budget de 1886 prévoyait la création de soixante-treize emplois nouveaux, qui porteraient à 350 employés le chiffre du personnel, et l’on annonçait comme inévitables pour les exercices suivans, de nouvelles créations, et une