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l’échanger contre de l’or dans certaines trésoreries déterminées, à condition que la somme présentée à l’échange soit au minimum de 250 francs. On n’avait compris dans la première refonte qu’une partie des anciens thalers de l’Union germanique : il en reste dans la circulation pour une somme de 500 à 550 millions de francs ; on leur a conservé provisoirement la pleine force libératoire au cours de 1 thaler pour 3 marcs. Enfin, des bons de la caisse impériale sans réserve métallique circulent à cours forcé pour une somme d’environ 180 millions de francs.

Un argument qui revient souvent dans la thèse du bimétallisme, c’est que l’Allemagne, dans l’impuissance de convertir en or son vieil argent, est obligée de respecter l’ancien thaler, et avoue par là son échec dans l’établissement de l’étalon unique. C’était simplement une mesure de transition ; il me semble même inévitable qu’elle soit bientôt abandonnée. La somme de 12 fr. 50 par tête mise à la disposition du public pour les appoints est évidemment insuffisante ; on parle de la porter à 15 francs, et ce ne sera pas assez. Un maximum de 20 francs ne serait pas exagéré, et avec la population actuelle de l’empire allemand, évaluée avec ses colonies à 48 millions d’habitans, le reste des thalers serait bientôt épuisé. Mais comme la loi conserve à ces pièces la force libératoire illimitée, les transformer en monnaie fiduciaire par les appoints dont la force est limitée à 12 fr. 50, ce serait réduire de 500 millions la circulation des monnaies réelles employées dans les gros paiemens. On attend donc pour compléter le système de l’étalon unique que la richesse métallique de l’empire se développe au point de ne laisser aucune inquiétude dans le monde commercial. On ne doutera pas que ce résultat ne soit atteint, si l’on considère que l’Allemagne ne possédait pas d’or pour ainsi dire, il y a dix ans, à l’origine de sa réforme, et qu’elle en a attiré aujourd’hui dans sa circulation pour plus de 2 milliards 1/2.

La pénurie de menue monnaie dont on se plaignait beaucoup, surtout dans les campagnes, fournit aux partisans des deux étalons une clientèle nombreuse, mais inconsciente et trop disposée à croire que la crise agricole dont on souffre en Allemagne autant qu’en France est la conséquence du nouveau régime monétaire ; on n’eut pas de peine à provoquer les doléances, les réclamations à l’adresse du gouvernement, et dans la dernière campagne bimétalliste, dont le plan semblait être une pression parlementaire exercée simultanément à New-York, à Londres, à Berlin et à Paris, une discussion soulevée au Reichstag, en coïncidence avec l’interpellation de M. de Soubeyran à notre chambre des députés, donna lieu à un débat de trois jours (février 1886). On y reproduisit de part et d’autre les argumens dont le public est depuis longtemps fatigué. En résumé,