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Il obtint du ministre des finances, M. Sadi-Carnot, une lettre en date du 31 octobre 1885, dont il faut détacher ce passage d’une haute importance : « La Banque s’engagerait à recevoir, conjointement avec les caisses publiques, les pièces de 5 francs de l’Union latine dans des conditions identiques à celles où elle reçoit les pièces d’argent françaises. Cet engagement serait pris pour la durée de la convention qui se négocie en ce moment. A l’expiration de la convention, la liquidation des pièces de 5 francs étrangères qui se retrouveraient dans ses caisses s’effectuerait pour le compte de l’état. » Ainsi, l’état prend à sa charge la responsabilité des pertes éventuelles.

Ces délibérations avaient laissé à la Belgique le temps de réfléchir ; elle pesa sans doute les embarras, les dangers qui pourraient résulter pour elle de son isolement ; elle se disposa à rentrer dans l’Union, si on adoucissait par quelques ménagemens les clauses de liquidation, trop inquiétantes pour elle. L’accord s’établit enfin sur cette base : la convention, prorogée pour cinq ans, restera en vigueur jusqu’au 1er janvier 1891. À cette époque, après échange fait des écus similaires, si le gouvernement français se trouve détenteur d’un solde de pièces belges de 5 francs d’argent, ce solde sera divisé en deux parties égales. Une moitié sera reprise par le gouvernement belge, qui les remboursera en or à leur valeur nominale, par paiemens échelonnés de trois mois en trois mois pendant cinq ans ; l’autre moitié restera pour compte du gouvernement français, qui cherchera le moyen de s’en défaire par les voies commerciales. Il était naturel que les autres coassociés, l’Italie notamment, demandassent un traitement pareil, et telle était l’impatience d’obtenir une clause de liquidation, même mauvaise, qu’on accorda tout sans réfléchir aux conséquences. La convention avec les arrangemens accessoires, signée le 12 décembre 1885, entre les plénipotentiaires des états intéressés, fut portée à la chambre des députés le jour même. Il fallait qu’une solution fût prononcée avant le 31 décembre; le temps manquait pour une étude approfondie, à laquelle d’ailleurs le monde parlementaire était peu préparé. Les plus graves préoccupations politiques absorbaient les esprits ; une perturbation commerciale, résultant de la rupture soudaine de l’Union, était à craindre. Il y avait, comme on dit vulgairement, carte forcée. L’œuvre de la conférence acquit force de loi par le vote des députés et du sénat.

Il faut voir maintenant ce que va donner ce genre de liquidation. Supposons, telle qu’elle est aujourd’hui, la situation respective, qui certainement ne sera pas améliorée dans trois ans. La France, avons-nous vu, grand réceptacle des écus étrangers, en