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où le monnayage était pratiqué librement par des entrepreneurs autorisés par l’état, et la fabrication générale des monnaies fut centralisée à Paris, où elle est exercée depuis 1879, sous forme de régie administrative. Depuis huit ans que la frappe des écus est interdite, les tableaux de la douane ont signalé chaque année des mouvemens d’argent monnayé qui auraient laissé chez nous des sommes importantes. En 1885, par exemple, l’excédent des entrées sur les sorties aurait dépassé 100 millions de francs ; mais les importations de cette nature ne doivent pas augmenter notablement le stock des pièces d’origine française. Je ne crois pas beaucoup au retour en masse de nos vieux écus ; ceux qui les ont exportés quand ils faisaient prime à l’étranger ne les ont pas mis en réserve : ils les ont jetés au creuset pour profiter de la plus-value du métal. Ces monnaies d’argent, dont la douane constate l’entrée, consistent pour la plus grande partie en pièces belges ou italiennes provenant de l’Union latine. Au surplus, en ce qui concerne les métaux précieux, les chiffres de la douane sont toujours suspects, non-seulement parce que les déclarations du commerce sont rarement exactes, mais parce qu’on y inscrit un va-et-vient des mêmes pièces qui peuvent faire double emploi et fausser les statistiques. Les seules indications probantes sont celles qui résultent des chiffres produits officiellement par les hôtels des monnaies. Or, en ajoutant aux 940 millions de monnaies d’argent français reconnus à la fin de 1869 les 419 millions ½ fabriqués à Paris depuis cette époque, on trouvera en nombre rond un total de 1,360 millions de francs[1] ; ce chiffre représente, à mon avis, le maximum des pièces de 5 francs existant actuellement, savoir 1,220 millions environ en circulation à l’intérieur et 140 millions probablement répandus dans les pays de l’Union.

À ce fonds de 1,220 millions d’origine nationale employés chez nous vient s’ajouter le montant des pièces étrangères qui se trouvent actuellement en France en vertu de l’Union latine. Quelle est l’importance de cette circulation accessoire? De quels élémens est-elle composée? La Banque seule aurait pu l’établir avec une entière précision. Il eût été, ce me semble, dans l’esprit de son rôle de satisfaire sur ce point la légitime curiosité du public. A deux reprises, en 1878 et 1885, le ministre des finances a cherché la lumière[2]. Les trésoriers-payeurs-généraux, receveurs particuliers

  1. Ce maximum de 1,360 millions est peut-être encore exagéré, car je n’ai pas tenu compte d’un versement de 146 millions en pièces de 5 francs compris dans l’indemnité de guerre payée à l’Allemagne.
  2. Voir le Bulletin de statistique du ministère des finances, publié mensuellement sous la direction éclairée et vigilante de M. de Foville, livraison d’août 1885.