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bien que les conditions de l’exploitation, de constater les accidens, d’établir les responsabilités. Ces inspecteurs d’un nouveau genre recevraient des émolumens qui seraient payés par les propriétaires des mines et que les préfets fixeraient. « Ainsi, a pu dire justement M. Piou, c’est le suffrage universel qui nomme les délégués, c’est le préfet qui les taxe, ce sont les exploitans qui les paient, et personne ne les dirige. » En d’autres termes, c’est une organisation toute socialiste, tempérée par l’intervention discrétionnaire du préfet et dirigée contre la propriété. Voilà l’idéal ! — Qu’il s’agisse donc de l’industrie ou des institutions militaires, c’est toujours, on le voit, la même politique de désorganisation et d’agitation, qui n’a pris une certaine force, depuis quelques années, que par la faiblesse des majorités, parce que, sous cette apparence d’une prétendue concentration républicaine, les radicaux ont réussi à s’imposer à des gouvernemens prêts à toutes les concessions. Eh bien ! l’effet des derniers événemens a été précisément de commencer à dissiper cette équivoque en rejetant les radicaux dans une opposition irritée et implacable. C’est ce qu’on peut appeler la situation nouvelle. M. le président du conseil a beau mettre de la diplomatie dans ses déclarations, il ne peut plus s’y méprendre. Les circonstances le placent dans une position où il ne peut trouver une force réelle que dans une politique de raison pratique, de modération, d’apaisement, et il doit être d’autant plus porté à accepter résolument cette politique, que le ministère, s’il veut vivre, ne peut pas faire autrement. C’est là toute la question !

Dans le mouvement des choses qui se diversifie à l’infini et se déroule à travers l’Europe, il y a place pour tout. La politique a ses incidens violens qui passent, ses préoccupations qui survivent, ses diversions et ses spectacles où se plaît parfois l’orgueil d’un grand pays. Tout se mêle sans cesse. Évidemment, après les émotions qui ont agité les esprits pendant ces derniers mois et qui se sont quelque peu apaisées depuis, il est resté en Allemagne un assez sérieux sujet de préoccupation, qu’on peut essayer d’écarter par instans, qui ne pèse pas moins sur tout. Lorsqu’un souverain tout-puissant est arrivé à la dernière limite de l’âge, comme l’empereur Guillaume, il est certain que le moindre accident de santé peut devenir fatal ; c’est déjà un fait grave, et lorsque ce n’est plus seulement un empereur nonagénaire qui est menacé, qui, plie sous le poids de l’inexorable loi de la nature, quand l’héritier de la couronne, le prince impérial, semble, lui aussi, prématurément et dangereusement atteint dans sa santé, c’est assurément une étrange complication de plus. Il y a là un concours de circonstances ou de fatalités qui prend les proportions et le caractère d’un événement à tout instant possible, qui ravive aussitôt le sentiment de l’instabilité des choses.

Le fait est que, depuis quelque temps, tout est assez sombre à Ber-