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LA
CORRESPONDANCE DE HEGEL

On connaissait déjà en partie la correspondance de Hegel; plusieurs de ses lettres avaient paru dans un volume de ses Mélanges, M. Rosenkranz en avait cité d’autres en écrivant la biographie de son maître, d’autres encore se trouvent éparses dans les œuvres posthumes de Knebel et ailleurs. Le recueil que vient de publier M. Karl Hegel, fils aîné du grand penseur, en renferme beaucoup d’inédites et de fort intéressantes. On ne peut assez louer le soin qu’il a mis à les annoter, à fournir au lecteur tous les éclaircissemens nécessaires. Il est impossible d’être à la fois plus sobre et plus complet, et la conscience avec laquelle il s’est acquitté de son pieux devoir mérite d’être donnée en exemple à plus d’un éditeur[1].

Hegel ne figurera jamais parmi les grands épistolaires. Pour bien écrire les lettres, la première condition est d’y trouver son plaisir, et il ne prenait la plume que malgré lui; ses correspondans soupiraient longtemps après ses réponses. Il attendait, pour payer sa dette, d’avoir l’esprit libre, et il enviait le bonheur des gens d’affaires, qui, après en avoir expédié une, n’y pensent plus et passent à une autre. Il avait, lui, sa grande affaire, qui l’occupait sans cesse, et il se souciait peu d’en parler. — « Voici enfin, mon cher ami, écrivait-il à Cousin le 1er juillet 1827, la lettre que je vous écris depuis si longtemps. Je suis

  1. Briefe von und an Hegel, herausgegeben von Karl Hegel, in zwei Theilen, 2 vol. in-8o. Leipzig, 1887; Duncker et Humblot.