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elles peuvent se réunir, elles doivent se concentrer pour exercer la vertu par excellence. Pourquoi les communions dissidentes ne profiteraient-elles pas des établissemens de bienfaisance que protège l’église réformée ? Un traité peut intervenir en vertu duquel leurs enfans insoumis entreraient à l’École professionnelle et leurs ouvriers en chômage seraient reçus à l’asile temporaire. On peut différer sur l’interprétation d’un texte, on doit être unanime dans l’exercice de la charité. Les pasteurs sont passés maîtres en l’art de commenter les évangiles ; qu’ils se souviennent que les disciples ont trouvé Jésus causant avec la Samaritaine. La misère est plus dangereuse que l’esprit de propagande, car elle donne des conseils qui sont la perdition même.

Le nombre des protestans de Paris n’est pas tellement considérable qu’ils ne puissent se grouper dans une œuvre commune, où leurs coreligionnaires indigens, vicieux et libérés, recevraient l’assistance matérielle ou morale dont ils ont besoin. En s’appuyant sur les principes de l’Alliance évangélique, fondée à Lyon en 1844, on pourrait facilement créer une organisation générale où tous les cultes issus de la réforme seraient représentés et centraliseraient au bénéfice de tous, — des assistés aussi bien que des bienfaiteurs, — l’action des paroisses et l’action de la charité individuelle. Au lieu d’éparpiller les efforts, il serait plus utile, il serait de conception plus haute de marcher d’accord vers le même but, qui est de tuer la paresse, de soulager l’infortune, de diminuer le vagabondage et de protéger, par des mesures préventives, le groupe social auquel on appartient. Le système adopté par l’église réformée me semble excellent ; comme toutes choses humaines, il est susceptible d’améliorations qui s’indiqueront d’elles-mêmes et seront réalisées, car le bon vouloir ne manque pas aux hommes qui ont mission de l’appliquer. Mais bien plus fécond serait-il, ce système, si, au lieu d’être le partage d’un nombre limité de protestans, il pouvait être accepté par tous, sans distinction de sectes, sans exclusion de principes, dans une large communauté de bienfaits où les uns trouveraient la satisfaction d’eux-mêmes et les autres l’apaisement de leur souffrance. Les diaconats de l’église réformée sont en rapports constans de bienfaisance avec les diaconats de la confession d’Augsbourg ; je crois savoir qu’ils ne se refuseraient point à étudier cette question avec les autres communions du protestantisme ; si une entente intervenait, elle serait, je crois, à l’avantage de celles-ci, car elles s’ouvriraient l’accès d’instituts de bienfaisance, au moins aussi utiles que l’école professionnelle et que la maison hospitalière. Il en est encore qui méritent d’être signalés et que je m’efforcerai de faire bientôt connaître.


MAXIME DU CAMP.