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il n’y a de place pour aucune des installations que réclame l’hygiène. Il ne devrait y avoir, dans les villes, que des externats.

A la campagne, au contraire, l’air est vif et pur; la place ne fait pas défaut ; on peut espacer les bâtimens, en diminuer la hauteur, donner à toutes les parties de l’ensemble les proportions les plus avantageuses et réserver de grands terrains gazonnés et plantés d’arbres pour les jeux, les exercices et les installations qu’ils nécessitent. C’est ainsi qu’au lycée de Vanves, le vaste parc qui entoure les bâtimens scolaires renferme deux gymnases, l’un découvert, l’autre abrité, un manège avec piste, des salles d’escrime, et enfin la piscine de natation dont j’ai parlé plus haut. Le magnifique lycée Lakanal, que M. Baudot vient de faire construire pour le compte de l’état, est également un modèle de confortable et de salubrité.

Les établissemens d’éducation situés en dehors des villes ont, de plus, cet avantage qu’on se trouve en pleine campagne aussitôt qu’on en a franchi la porte. Pour aller respirer l’air des champs, les élèves n’ont pas besoin de traverser la ville, en files lugubres, marchant deux à deux, d’un pas languissant, au milieu de spectacles qu’il serait préférable de leur épargner. C’est bien pis encore lorsqu’on sortant du lycée ils tombent en pleine fête foraine, comme cela arrive tous les jours à ceux du collège Rollin.

Il est donc indispensable de ne plus construire de lycées dans l’intérieur des villes et de transporter peu à peu à la campagne tous ceux qu’il sera possible de déplacer. Cette décision rencontrera de l’opposition de la part des professeurs et même des familles, à cause de la distance à franchir. Le lycée Lakanal, pour lequel on a fait des dépenses considérables, est redouté des uns et délaissé par les autres, parce qu’il est loin de Paris. Il n’est pas de mesure qui n’ait ses mauvais côtés ; mais celle-là est si impérieusement réclamée par l’hygiène, qu’il faudra passer sur les petits inconvéniens qu’elle peut avoir, et tout le monde finira par en prendre son parti.


V.

Après avoir indiqué quelles sont les bases de la réforme réclamée par l’hygiène, il me reste à dire un mot des moyens à l’aide desquels on peut parvenir à la réaliser. Tout le monde en reconnaît l’urgence ; malheureusement cet accord ne suffit pas. Il faudra vaincre bien des résistances, avant de mettre un terme au surmenage intellectuel. Il a pour auxiliaires l’habitude, les traditions universitaires, et pour complices le zèle des professeurs, l’amour-propre des parens et l’émulation des écoliers.