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L’ARMÉE ROYALE EN 1789.

Ainsi, la répartition se faisait d’une façon tout à fait arbitraire. Faute d’une législation précise, fondée sur le dénombrement exact de la population, les intendans suivaient tantôt une marche, tantôt une autre, et il en résultait de grandes inégalités entre les paroisses et les généralités. « Quelques-unes fournissaient le double des autres sur un nombre égal d’hommes. » Ainsi encore, et c’est ici surtout qu’apparaît le vice du système, non-seulement les deux premiers ordres étaient exemptés de la milice, comme de la taille et de la corvée, mais la roture elle-même avait ses privilégiés, si nombreux qu’en fait la catégorie des miliciables se bornait à peu près exclusivement aux petites gens. Étaient exempts, entre autres, pour cause d’agriculture :

Le fils unique et à son défaut le valet d’un laboureur ayant le labourage d’une charrue, âgé de soixante-cinq ans ou infirme ; le fils unique et à défaut le valet d’une veuve de laboureur ayant le labourage d’une charrue ; le fils et à défaut un valet d’un laboureur ayant quatre chevaux de labour toute l’année ; le fils et un valet, et à défaut de fils deux valets d’une veuve de laboureur ayant quatre chevaux de labour toute l’année ; le fils unique ou le fermier d’une terre au-dessus de 1,000 livres de revenu; le berger possédant au moins cent bêtes à laine ; le maréchal ou le charron de la paroisse, etc.

Pour cause de commerce ou d’industrie : les marchands ou artisans établis dans les villes et payant 40 livres de taille ; les maîtres de métier dans les villes de jurande; le principal commis d’un négociant en gros ; les monnayeurs, ajusteurs, changeurs, imprimeurs, orfèvres et horlogers maîtres ; le directeur de forges et son commis, le fondeur et son garde, le marteleur et son chauffeur, l’officier et son principal valet, etc.

Pour cause de profession libérale : les médecins et chirurgiens, les apothicaires reçus maîtres, eux et leurs enfans ; les maîtres d’école ayant trente ans accomplis et approuvés par l’évêque diocésain ; les étudians issus de père ne faisant aucun métier.

Pour cause d’utilité générale : les maîtres de poste ; leur commis principal, leur fils ou leur postillon ; les principaux employés et les conducteurs de messagerie ; les salpêtriers et leurs fils et leurs ouvriers utiles.

Pour cause de justice, finances et fonctions diverses : les pourvus de charges de justice et de finance, eux et leurs enfans ; les maires, échevins, conseillers, assesseurs et procureurs du roi, eux et leurs enfans; le fils aîné et les maîtres clercs des avocats, procureurs, notaires et greffiers en chef; les principaux employés de la ferme