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au sud et à l’ouest la sécurité du territoire livré à la colonisation. L’issue de la convention de la Tafna a prononcé sur le système d’occupation restreinte. Je ne me dissimule pas que de grands sacrifices doivent être la suite de la position dans laquelle la force des choses nous a placés. Ces sacrifices, je viens, au nom de la colonie, les demander au roi et au pays; 12,000 hommes de plus sont indispensables ; j’en fais au gouvernement du roi la demande formelle. Je demande surtout qu’il n’y ait aucune hésitation et que, dès l’ouverture de la session, un vote non équivoque de la législature, un crédit de 20 ou 30 millions, s’il le faut, vienne enlever à l’émir sa dernière espérance. » Avant le 17 décembre, près de 5,800 hommes d’infanterie étaient déjà réunis à Toulon.

« Le roi et son conseil, écrivait au maréchal le duc d’Orléans, ont accepté sans hésitation, sans récrimination, la situation actuelle de l’Algérie. L’opinion publique, la presse, ont suivi cet exemple : les chambres seront entraînées de même. Jamais général en chef n’aura été soutenu et traité comme vous l’êtes : appui moral, récompenses pour vos troupes, pouvoir d’agir, liberté de mouvemens, renforts immédiats et abondans en hommes, chevaux, mulets, matériel, approvisionnemens de tout genre, vous aurez tous les élémens d’un succès que garantit votre habileté et que réclame un pays qui a droit d’être jaloux de son honneur, lorsqu’il se montre prodigue de ses ressources. La juste confiance du roi et de son gouvernement a dû laisser au général en chef, qui est sur les lieux et qui est le seul juge de l’opportunité et de la possibilité des opérations, le choix des coups que, dans cette lutte critique et décisive, il s’agit de porter à la puissance d’Abd-el-Kader ; cependant, la pensée du roi et du conseil serait d’opérer principalement par Alger dans la province de Titteri, de s’y établir fortement, en occupant, s’il y a lieu, Médéa, Miliana, Cherchel, et de se relier par la vallée du Chélif avec les troupes qui d’Oran auraient fait une diversion vers ce fleuve, sans occuper, dans une première campagne. Mascara, ni surtout Tlemcen. Reprendre, pour une lutte solennelle, une place encore chaude, si je puis m’exprimer ainsi, parmi ces troupes que je viens de commander dans une expédition presque pacifique, répondre à l’appel que l’Afrique fait à ses défenseurs, c’est plus qu’un droit pour moi, c’est à mes yeux un devoir d’honneur qui fait taire toute autre considération et qui a été apprécié par le roi et son conseil. J’ai écarté l’offre d’un commandement distinct du vôtre; le service en eût souffert. Je n’ai d’autre ambition que le bien général. Je partirai d’ici avec mon frère d’Aumale, qui fera ses premières armes sous vos ordres. L’opinion publique et la presse se préoccupent vivement de mon départ, et, tant que cela ne va pas jusqu’à des manifestations qui troubleraient