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est la dime des récoltes, la zekat, qui est la dîme des troupeaux, et l’hokor qui est la redevance imposée aux locataires des terres domaniales, lesquelles occupaient une très grande part du sol cultivable dans la province. Autour de Constantine, l’opération fiscale fut conduite avec une sage prudence par les soins du hakem Sidi Mohammed Hamouda. Dans la région maritime, elle lut confiée au commandant de Mirbeck, des spahis de Bône, qui fit successivement, avec l’assistance des caïds, d’un cadi et d’un agent du trésor, trois tournées de perception sans beaucoup de résultat, parce que le gouverneur-général avait prescrit la plus grande modération dans ce premier essai de recouvrement. Le maréchal Valée avait en horreur les razzias et en exécration le principe de la responsabilité des tribus, qui confondait iniquement, disait-il, l’innocent avec le coupable. Ce fut bientôt un sérieux sujet de désaccord entre lui et le général de Négrier, qui avait, au contraire, la main prompte aux exécutions rapides et sommaires.

La garnison de Constantine se composait du 26e et du 61e de ligne, du 3e bataillon d’Afrique, de deux escadrons du 3e chasseurs d’Afrique et d’un escadron de spahis ; il y faut ajouter un bataillon de tirailleurs indigènes, formé en grande partie des anciens janissaires du bey Ahmed, qui étaient passés au service de la France ; de ce noyau primitif sont issus plus tard les régimens de turcos. Les compagnies d’élite de l’infanterie et la cavalerie étaient toujours prêtes à marcher au premier signal ; quand cette colonne mobile devait sortir, les ordres étaient donnés le soir, après la fermeture des portes, et le lendemain, dès la pointe du jour, elle était en route. Ce fut ainsi que, du 10 au 13 février 1838, le général de Négrier fit dans l’ouest une promenade militaire jusqu’à la petite ville de Mila, dont le caïd reçut l’investiture de sa main, et, quelques jours après, une expédition beaucoup moins pacifique à seize lieues au sud-ouest, contre la grande tribu des Ouled-Abd-en-Nour, qui avaient enlevé du bétail à des douars soumis. Ce fut une vraie razzia : cent soixante Arabes furent tués ; des bœufs, des milliers de moutons furent ramenés par la colonne. Au mois d’avril, le général reçut d’Alger des instructions qui lui prescrivaient de reconnaître au nord, dans la direction de Stora, un chemin qui pourrait mettre Constantine en communication directe avec la mer. Partie le 7, la colonne mobile bivouaqua, le 8, à El-Arouch et parvint, le 9, à Skikda, sur les ruines de Rusicada. Les Kabyles, dont elle avait inopinément traversé les montagnes, avaient été surpris ; au retour, ils attaquèrent l’arrière-garde sans lui faire beaucoup de mal. La reconnaissance avait atteint son but : la communication était facile et, comparée à la route de Bône, plus courte des deux tiers.

Vers la fin d’avril, le lieutenant-colonel Dorliac, du 12e de ligne,