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sûreté générale ; ce n’est pas par méfiance qu’il requiert cette précaution, mais c’est pour l’ordre[1].

Cette apposition de scellés fut de courte durée ; ils furent levés le 28 septembre, en exécution d’un décret promulgué le 24 par la Convention, sur la proposition du comité des finances, qui n’avait pas perdu de vue la liquidation des diverses compagnies financières. Delamarre, l’un de ses membres, fit remarquer que la nation avait intérêt à se faire rendre promptement leurs comptes, et que le décret du 5 juin, qui avait supprimé la commission de liquidation, contrariait visiblement ce but ; il demanda et obtint que les scellés seraient levés sur les papiers et bureaux des compagnies et sur les papiers particuliers des fermiers-généraux, des régisseurs, et des administrateurs des domaines. Ceux-ci devaient être remis en possession de tous les documens nécessaires pour qu’ils pussent présenter la totalité de leurs comptes avant le 1er  avril 1794. Les fermiers-généraux obtenaient enfin satisfaction ; ils purent reprendre le travail de la liquidation après une fatale interruption de cinq mois ; ils s’y remirent avec tranquillité, car ils étaient sûrs de la régularité de leurs écritures et de leur comptabilité, qui, suivant Mollien, méritait sa réputation d’exactitude, les fermiers-généraux présentant leurs résultats de bonne foi et sans dissimulation.

Au moment où Delamarre obtenait le décret du 24 septembre, parut pour la première fois à la tribune l’homme qui porte devant l’histoire la plus large part de responsabilité dans le meurtre des fermiers-généraux.

Antoine Dupin, qui, avant la révolution, portait le nom de de Beaumont et remplissait les fonctions de contrôleur-général surnuméraire des fermes, avait été envoyé à la Convention par le département de l’Aisne. Il avait pris place d’abord sur les bancs de la Montagne, et, dans le procès de Louis XVI, avait voté contre la peine de mort. Le 26 septembre, il demanda à la Convention de compléter le décret du 24, en chargeant de la surveillance des comptes une commission de six personnes qui s’offraient à dénoncer tous les abus en finances ; et il fit voter le lendemain des articles additionnels, par lesquels cinq commissaires réviseurs, qui prétendent être en état de procurer des connaissances sur les abus commis et donner la preuve des malversations effectuées, sont autorisés à examiner

  1. Les papiers en langue anglaise furent renvoyés au comité d’instruction publique, l’examen en fut confié le 29 septembre à Romme et à Fourcroy ; une nouvelle délibération du 2 novembre (12 brumaire) chargea Fourcroy et Guyton-Morveau de les examiner. Cette correspondance, qui renfermait peut-être des lettres des grands chimistes anglais, semblerait avoir disparu ; je n’en ai retrouvé la trace ni aux Archives nationales, ni dans les papiers de Lavoisier.