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Prusse qu’il a soumise, qu’il a mutilée, qu’il exploite, et dont il détient encore les plus fortes places; ajoutez un dernier tableau intérieur, celui qui lui représente les mers du Nord, l’Atlantique et la Méditerranée, toutes les escadres du continent, au large et dans les ports, depuis Dantzig jusqu’à Flessingue et Bayonne, depuis Cadix jusqu’à Toulon et Gaëte, depuis Tarente jusqu’à Venise, Gorfou et Constantinople[1]. — Dans l’atlas psychologique et moral, outre une lacune primitive qu’il ne comblera jamais, parce qu’elle tient à son caractère, il y a quelques résumés faux, notamment à l’endroit du pape et des consciences catholiques ; pareillement, il cote trop bas l’énergie du sentiment national en Espagne et en Allemagne ; il cote trop haut, en France et dans les pays annexés et sujets, son prestige, le reliquat de confiance et de zèle sur lequel il peut compter. Mais ces erreurs sont l’œuvre de sa volonté plutôt que de son intelligence ; par intervalles, il les reconnaît ; s’il a des illusions, c’est qu’il se les forge ; laissé à lui-même, son bon sens resterait infaillible ; il n’y a que ses passions qui puissent troubler sa lucidité. — Quant aux deux autres atlas, surtout l’atlas topographique et militaire, ils sont aussi complets et aussi exacts que jamais ; la réalité qu’ils figurent a eu beau s’enfler et se compliquer ; toute monstrueuse qu’elle soit à cette date, par leur ampleur et leur précision, ils lui correspondent encore, trait pour trait.

Mais cette multitude de notations n’est que la moindre partie de la population mentale qui pullule dans cette cervelle immense ; car, sur l’idée qu’il a du réel, germent et fourmillent les conceptions qu’il se fait du possible; sans ces conceptions, nul moyen de manier et transformer les choses, et l’on sait s’il les manie, s’il les transforme. Avant d’agir, il a choisi son plan, et, s’il a choisi ce plan, c’est entre

  1. Cf., dans la Correspondance les lettres datées de Schœnbrunn près de Vienne, pendant les mois d’août et de septembre 1809, notamment : 1° les lettres et instructions très nombreuses à propos de l’expédition anglaise à Walcheren ; 2° les lettres au grand juge Régnier et à l’archichancelier Cambacérès sur l’expropriation pour cause d’utilité publique (21 août, 7 et 29 septembre) ; 3° les lettres et instructions à M. de Champagny pour traiter avec l’Autriche 19 août, 10, 15, 18, 22 et 23 septembre); 4° les lettres à l’amiral Decrès pour envoyer des expéditions navales aux colonies (17 août et 26 septembre); 5° la lettre à Mollien sur le budget des dépenses (8 août); 6° la lettre à Clarke sur la statistique des fusils en magasin dans l’empire (14 septembre). — Autres lettres, pour faire composer deux traités d’art militaire (1er octobre), deux ouvrages sur l’histoire et les empiètemens du saint-siège (3 octobre), pour interdire les conférences de Saint-Sulpice (15 septembre), pour défendre aux ecclésiastiques de prêcher hors des églises (24 septembre). — De Schœnbrunn, il surveille le détail des travaux publics en France et en Italie : par exemple, lettres à M. de Montalivet (30 septembre), pour envoyer en poste à Parme un auditeur qui fera réparer sur-le-champ une digue crevée, et (8 octobre) pour accélérer la construction de plusieurs ponts et quais à Lyon.