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La suppression des quartiers insalubres, quand elle s’opère sur une grande échelle et qu’elle entraîne la démolition d’un grand nombre de maisons, implique la nécessité d’en bâtir de nouvelles, pour loger les gens qui se trouvent mis sur le pavé. On n’en a pas tenu un compte suffisant, lors de la transformation de Paris, et c’est pour cela que les grands travaux qu’on y a faits n’ont pas produit, au point de vue de la salubrité, tout le résultat qu’on était en droit d’en attendre. Ils ont assaini les quartiers du centre ; mais ils ont produit un encombrement dangereux dans les arrondissemens excentriques, où la population ouvrière a été forcée de refluer. Cet entassement s’est accru par suite de l’affluence des travailleurs de la province qui sont accourus à Paris attirés par les salaires élevés, par l’accroissement de travail, que tous ces mouvemens devaient produire. L’immigration a continué pendant de longues années et, comme les nouveau-venus étaient étrangers à la population parisienne, ils se sont presque tous casés dans les logemens garnis qui existaient déjà. Le nombre de ces derniers n’a pas augmenté d’une manière sensible, et l’encombrement est arrivé à son comble. Il a produit ses conséquences ordinaires ; c’est-à-dire l’augmentation proportionnelle du chiffre des maladies infectieuses. Le nombre des décès causés par la fièvre typhoïde, la diphtérie et les fièvres éruptives a augmenté régulièrement d’année en année, jusqu’en 1882, époque à laquelle la fièvre typhoïde a pris un caractère véritablement épidémique et a appelé l’attention générale sur l’insalubrité croissante de Paris. Depuis cette époque, la situation s’est améliorée peu à peu. Cela tient à ce que le ralentissement qui s’est produit dans les constructions et dans les travaux de tout genre a forcé un grand nombre d’ouvriers à retourner en province et que l’entassement a cessé dans les logemens garnis. Le nombre de ceux qui les habitent a diminué de 21,000 depuis six ans. Le 1er octobre 1882, on comptait à Paris 11,535 logeurs et 243,56A locataires ; le 1er octobre 1886, il n’y avait plus que 10,749 logeurs et 222,044 locataires.

Il est juste de tenir compte également de la surveillance plus attentive dont ils sont aujourd’hui l’objet. A la suite de l’épidémie de 18s2, M. Camescasse, alors préfet de police, a créé, pour ces logemens, un service spécial d’inspection[1] qui a rendu les plus grands services à l’hygiène et qui continue à fonctionner avec le même succès. Toutefois l’inconvénient que je signalais en commençant n’a pas complètement disparu et pourrait produire les mêmes résultats, si la reprise du travail ramenait à Paris les ouvriers de la province. Toutes les constructions nouvelles ont été édifiées dans le même dessein.

  1. Ordonnance du 25 octobre 1883.