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a remplacé celle de la Dhuis, dans quelques quartiers du XXe arrondissement. Ainsi, une partie de la population de Paris a bu, cette année, pendant trente-neuf jours, de l’eau de la Seine et de la Marne; celle de l’Ourcq est consommée en tout temps dans certains quartiers, dans la plupart des casernes et dans quelques hôpitaux. On a peine à le croire lorsqu’on songe à tout ce que charrient ces deux rivières et à l’impureté de leurs eaux. Je me garderai bien d’insister sur ce sujet. Il est de ceux qu’il faut réserver pour les réunions de médecins et d’hygiénistes, devant lesquelles j’ai déjà eu plusieurs fois l’occasion de les traiter; il vaut mieux s’en tenir à constater ce desideratum, tout en rendant justice aux efforts de l’administration pour le faire cesser et aux progrès accomplis par elle. On se rendra compte de l’un et de l’autre, si l’on veut bien se rappeler qu’en 1789 Paris n’avait que 7,986 mètres cubes d’eau à distribuer à sa population, tandis qu’un siècle après, il en aura 650,000 mètres cubes. La ration quotidienne de chacun de ses habitans se sera élevée de 13 litres à 300. Au lieu de 85 fontaines de puisage, on en comptera 17,000; au lieu de 455 concessions, il y aura 70,000 abonnemens. Ces progrès ont demandé bien du temps pour s’accomplir. L’alimentation de Paris a passé par plusieurs étapes. C’est d’abord le canal de l’Ourcq projeté en 1785, décidé en 1802, livré vingt ans après et terminé en 1837. C’est en second lieu le magnifique projet de Belgrand et les beaux ouvrages exécutés par lui de 1854 à 1878. C’est lui qui a conduit à Paris les eaux de la Dhuis en 1866 et celles de la Vanne en 1874. C’est encore lui qui a entrepris la double canalisation à la faveur de laquelle l’administration peut livrer de l’eau de source à domicile et réserver l’eau de rivière pour la voie publique. L’œuvre de Belgrand se poursuit, et l’ingénieur en chef du service des eaux de Paris, M. Bechmann, nous promet qu’elle sera terminée en 1889. Attendons avec confiance la réalisation de cet engagement.

La plupart des grandes villes de France et, entre autres, Lyon, Bordeaux, Toulouse et Nantes, sont beaucoup moins bien dotées que Paris sous le rapport de la quantité ; mais, en ce qui tient à la nature des eaux, la plupart des localités de quelque importance sont alimentées aujourd’hui par des sources venant du dehors et amenées en ville, dans des conditions satisfaisantes d’abondance et de pureté. Une foule de villages s’imposent même, comme je l’ai dit, quelques sacrifices pour procurer ce luxe, le seul que l’hygiène puisse leur conseiller.

La seconde condition qui s’impose à toutes les agglomérations humaines, celle de se débarrasser de ses immondices, est plus difficile à remplir. La question est aussi plus délicate à traiter dans