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dans le commerce, les transports et la banque. Pendant beaucoup d’années, ils n’entraient pas dans le pays et continuaient de grossir, en France, en Angleterre, en Turquie, en Égypte. On faisait des donations, on créait des établissemens utiles, à Athènes, au Pirée ou ailleurs ; mais les donateurs tiraient ces présens de leur superflu. La Grèce en général n’a sérieusement profité de ces fortunes acquises au dehors que du jour où les riches Hellènes ont commencé à rentrer dans leur patrie et à y dépenser leurs revenus. Jusque-là, c’est le travail du paysan et du marin qui a dû faire presque à lui seul les frais de l’administration du royaume et des créations de toute sorte opérées par la loi. On ne doit donc pas s’étonner si le budget hellénique a dû recourir souvent à des emprunts et à des emprunts onéreux.

Le plus lourd a été celui de 1824, contracté au nom de toutes les provinces insurgées et resté, après la guerre, à la charge du petit royaume que l’on venait de fonder. À cause de son origine commune, la Grèce n’avait pas voulu le reconnaître ou s’en charger à elle seule. Les titres étaient tombés très bas et avaient pour la plupart été acquis par des Hollandais. La Grèce les a rachetés pour faire taire les plaintes et au grand bénéfice de ces détenteurs. Les nouveaux emprunts sont échelonnés sur une vingtaine d’années comprises entre 1863 et 1885, une partie a déjà été remboursée par des tirages réguliers. Ils formaient un total de 473 millions, auxquels il faut ajouter des obligations foncières de la banque nationale avec tirage de lots. Ces emprunts, émis à un prix fort au-dessous de leur valeur de remboursement, sont loin d’avoir produit la somme ci-dessus. En outre, ils portent un intérêt de 5, 6, de 8 et jusqu’à 9 pour 100. Ils sont donc une charge écrasante pour le budget. Les Hellènes enrichis au dehors et qui, rentrés dans le pays, y achètent des propriétés ou y créent des industries, font doublement acte de patriotisme ; car, par les impôts qu’ils payent, les dépenses qu’ils font et les tributs dont ils affranchissent la contrée, ils soulagent d’autant le budget de l’état. Malheureusement, les événemens de Bulgarie, en rompant l’équilibre entre les populations de l’Europe orientale, ont poussé les Grecs à des préparatifs militaires énormes pour eux et par suite à de nouveaux engagemens. En 1886, les dépenses de ce chef ont grossi de 63 millions : cette somme vient en déficit s’ajouter à l’insuffisance des recettes déjà constatée. En effet, le budget voté, pour 1886, avait présenté en recette un chiffre de 88,324,000 francs, et en dépenses 89,074,634 ; c’était déjà un déficit de plus de 750,000 francs qui, dans notre budget de 3 milliards et 1/2, équivaudrait à un déficit de 300 millions.