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un réservoir romain; on le réparait, ainsi que l’aqueduc, dont on ne connaissait pas encore le point de départ ; des industriels français établissaient les conduits souterrains. Depuis lors on a construit un second réservoir ; on a capté d’autres sources à quatre ou cinq lieues de distance et la ville se trouve abondamment pourvue. Des égouts et des tombereaux emmènent au loin les immondices.

Devant le palais est un jardin d’orangers avec un jet d’eau, puis une place entourée d’hôtels. C’était naguère la plus fréquentée de la ville; quand je quittai Athènes, en 1875, on en nivelait une autre dans le quartier inférieur ; elle portait déjà le nom de place de la Concorde. Elle ne ressemble pas à celle de Paris, quoique l’avenue de Patissia ait quelque analogie de rôle avec nos Champs-Elysées. Elle est entourée de fort belles maisons et d’hôtels ; on y remarque un café d’un luxe éblouissant, tout à la française, servi par des garçons élégamment vêtus, et pourvu de journaux du monde entier. La place elle-même est un bosquet d’arbres toujours verts, autour desquels s’épanouissent des fleurs parfumées. Des orchestres y donnent des concerts. Ainsi tous les sens sont satisfaits. C’est là maintenant que les Hellènes et les étrangers viennent chaque soir se reposer.

On a construit dans Athènes un grand nombre d’établissemens publics. Nous en pourrions donner la liste complète, dont le chiffre étonnerait sûrement les lecteurs et même les Athéniens. Disons seulement que les plus beaux édifices se rapportent à l’instruction publique et aux œuvres de bienfaisance. Plusieurs d’entre eux ont été construits et dotés par des particuliers ; l’état s’est ainsi trouvé déchargé de dépenses considérables et que, sans doute, il n’aurait pas faites. Sans aucun doute il n’aurait pas consacré, comme M. Sina, plusieurs millions à l’élégant édifice de marbre, orné de colonnes, de peintures et de frontons sculptés, qui porte le nom d’Académie. Jusqu’à ce jour, cette somptueuse imitation de l’antique reste sans destination certaine et à peu près sans emploi; un pays qui a des routes à faire ne s’amuse pas à ces jeux de la richesse et de la vanité. C’est le jugement que j’ai souvent surpris dans la bouche des Athéniens ; mais enfin cette Académie est un ornement de la nouvelle Athènes et pourra servir un jour.

Le rapide accroissement de la capitale a eu, comme en tous pays, pour conséquence immédiate la plus-value des terrains et l’augmentation des loyers. J’ai vu de nouveaux arrivans fort embarrassés pour se loger et restant à l’hôtel ; j’ai vu aussi, près du palais du roi, des terrains à 0 fr. 60 le mètre, qui, plus tard, se sont vendus 200 fr. Cet enchérissement s’est propagé de proche en proche : de riches Hellènes, venus de Constantinople ou d’ailleurs, se sont construit de belles maisons dans des quartiers éloignés du centre, sur des terrains