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commises dans les derniers temps et sur la pratique des reports effectués hors de la Bourse, pratique qui a contribué dans une si large mesure à encourager les entreprises des haussiers, en faussant les conditions du loyer de l’argent.

De ce fait seul on devait donc s’attendre à un relèvement sensible des taux de report, à des exigences plus grandes des capitaux qui trouvent leur emploi à court terme sur le marché. Le second incident que nous venons de rappeler ci-dessus a eu pour résultat, en provoquant une petite crise monétaire à Londres et en contraignant la Banque d’Angleterre à porter le taux de son escompte à 5 pour 100, d’accentuer encore cette tendance à la cherté des capitaux. Il a fallu envoyer de l’or en Amérique, et si la Banque de France n’avait pas laissé opérer une brèche de quelques dizaines de millions dans son stock d’or, le taux de l’escompte aurait dû être porté à 6 pour 100.

Malgré ce concours de circonstances défavorables, la liquidation s’est encore mieux passée qu’on n’était en droit de l’espérer. Les banquiers et les institutions de crédit qui ont un si grand intérêt, en vue des affaires dans lesquelles ils sont engagés ou de celles qu’ils ont en préparation, au maintien des cours atteints par nos fonds publics et par la plupart des valeurs, ont fait tous leurs efforts pour faciliter à la spéculation le passage d’une année à l’autre. Les reports ont été élevés, mais sans exagérations, et la fixation des cours de compensation n’a pas infligé de pertes bien sensibles aux acheteurs.

Le 3 pour 100 a été compensé à 82.50 ; l’amortissable, à 85.40, coupon détaché; le 4 1/2, à 110.10. Si l’on ajoute à ces prix les taux moyens de report, on obtient pour les trois fonds, fin janvier, 82.76, 85.66 et 110.42. Après quinze jours écoulés, nous trouvons le premier de nos fonds ramené à 82.20, le second à 84.70, le dernier à 110.05. 11 s’est donc produit, dans cette première moitié de janvier, une réaction d’une certaine importance, et cette réaction de nos rentes a été accompagnée d’un mouvement de recul encore plus vif sur les valeurs et rentes étrangères, ainsi que sur quelques-uns de nos titres nationaux dans lesquels la spéculation était plus spécialement engagée.

Les intermédiaires ont fait évidemment des efforts pour dégager la place restée très chargée à la hausse. Ce travail s’est poursuivi depuis les premiers jours du mois et n’est sans doute pas encore terminé. Des crédits ont été limités, il y a eu des liquidations importantes, les unes volontaires, les autres forcées. La position de l’agent de change, en suspension de paiemens, a continué à peser sur le marché par une série de ventes qui n’ont pas toujours trouvé aisément leur contre-partie. Enfin, la spéculation a eu à tenir compte de considérations politiques se rattachant d’une part à la discussion de la loi militaire au Reichstag allemand, de l’autre à l’ouverture de la session de 1887 des chambres françaises.